Il est ressuscité !

N° 246 – Août 2023

Rédaction : Frère Bruno Bonnet-Eymard


CAMP NOTRE-DAME DE FATIMA 2022

“ Sainte Église notre Mère ” 
L’abbé de Nantes, défenseur de la foi

APRÈS la conférence de frère François, qui nous  a montré quelle révolution copernicienne la funeste réforme de Vatican II a opérée dans les institutions, les mentalités et les mœurs des catholiques, jusqu’à ébranler la Constitution même de l’Église (cf. Il est ressuscité n° 244, juin 2023, p. 5-20), il nous faut voir maintenant comment l’abbé Georges de Nantes, notre Père, s’est dressé à l’encontre de cette formidable apostasie, de toute la force de sa foi et de son amour de l’Église, non seulement en “ enfant légitime ” et en “ défenseur de la foi ” comme l’a qualifié le carme anglais Brocard Sewell (CRC n° 233, juin 1987, p. 23-24), mais en “ témoin véridique et fidèle ” de cette foi en l’Église.

Ce fut la “ grande affaire ”, le combat de sa vie, que nous devons retracer ici, en trois parties : avant, pendant et après le Concile. Avec, en introduction, un petit fait qui remonte au temps du Séminaire, extraordinairement figuratif de ce qui est venu ensuite.

Ô ÉGLISE SAINTE, À QUI IRIONS-NOUS ?

Pendant les vacances de l’été 1945, les séminaristes devaient préparer un sermon qu’ils auraient à prononcer durant l’année devant leurs confrères et supérieurs. « Une liste de sujets était affichée en juin, et chacun pouvait choisir. L’un d’eux me conquit. C’était la parole de saint Pierre à Notre-Seigneur, quand tous l’abandonnaient après le discours sur le Pain de Vie : “ Seigneur, à qui irions-nous ? Vous avez les paroles de la vie éternelle, et nous savons, et nous croyons que vous êtes le Saint de Dieu. ” Mais il me vint à l’esprit de reprendre cette parole magnifique pour l’adresser à la sainte Église, notre mère. »

En effet, au lendemain de la prétendue “ Libération ”, Georges de Nantes avait vu presque tous ses confrères séduits par l’attrait de la nouveauté progressiste et tentés de glisser dans le réformisme, « sans qu’ils se rendent compte de l’altération de leur caractère et de l’évanouissement de leurs convictions antérieures. Ils imaginaient qu’ils avançaient en sainteté et entraient davantage dans l’esprit de l’Église, à mesure qu’ils pensaient moins par eux-mêmes et acceptaient tout. Je ne me sentais pas absolument seul mais dangereusement en flèche, face aux tempêtes prochaines.

« Et me voilà devant mon papier, dans l’immobilité des grandes journées de chaleur et de solitude de Chônas. Le séminaire est loin. J’écris... C’est comme une lettre à mes Pères et à mes confrères que bientôt je devrai leur déclamer du haut de la chaire. Je sais ce que je veux leur dire : Vous êtes l’Église, mes chers frères et mes Pères. Nous avons eu de petites et de grandes disputes, je ne sais pas la gravité que vous leur attribuez. Je vois bien que mon avenir se joue en ce moment. Mais se joue aussi le vôtre. Vous êtes en pleine évolution vers autre chose, et je ne sais pas si vous ne nous perdrez pas et n’êtes pas en train de perdre avec nous l’Église, du moins notre Église de France. Mais cela ne change rien à la substance des biens que nous avons en divin partage. Ô Église catholique, à qui irais-je, à qui irions-nous ? C’est Vous qui avez les paroles de la vie éternelle. Et nous savons, et nous croyons tous que vous êtes la chose de Dieu, l’œuvre du Seigneur, son Épouse bien-aimée, son sanctuaire. » (Mémoires et Récits, tome II, p. 224-225)

Peut-on être davantage enfant de l’Église ? Et voilà comment la parole inspirée de saint Pierre fut pour le futur théologien de la Contre-Réforme, dans « cette fêlure qui devint brisure et faillit tourner à la dramatique cassure... une lumière sur ce que je devais penser, dire et faire ». Ces pensées, ces paroles, ces actions sont les nôtres aujourd’hui, plus que jamais.

LA PIRE MENACE SUR L’ÉGLISE

Cette “ cassure ” ne se produisit pas, puisque notre Père fut ordonné prêtre le Samedi saint 27 mars 1948. « L’important était le don qui m’était fait, en pleine validité, et le caractère inamissible dont je suis marqué pour l’éternité... C’était bien un “ Mystère de foi ” que cette assomption d’un homme ordinaire et misérable pécheur, au rang de prêtre du Très-Haut et de médiateur. » (CRC n° 6, mars 1968, p. 19)

Sa foi invincible en l’Église anime les articles d’Amicus, assurant la chronique de politique religieuse du journal “ Aspects de la France ” entre 1949 à 1952, et se conjugue admirablement, sous sa plume alerte et frémissante, avec le service du bien commun de la patrie, de nos patries, de toute la ­Chrétienté. Mais c’est dans sa dénonciation de la thèse prônée par le dominicain Yves Congar, dont le livre “ Vraie et fausse Réforme dans l’Église ” venait de paraître, en décembre 1950, que Georges de Nantes se révèle déjà un maître. Dans la théorie du dominicain, admirateur de Luther, qu’il voulait imiter dans sa Réforme de l’Église, non du dehors en se faisant excommunier, mais du dedans en la faisant évoluer, Amicus voit se profiler la « grande mue de l’Église au vingtième siècle » et démasque ce projet insensé :

1. Qui repose sur un mensonge. Le réformisme révolutionnaire qui fait florès en France au lendemain de la Libération n’a rien à voir avec le renouveau de 1943, fruit de l’intelligence et de la charité catholiques, épanouies sous l’autorité tutélaire du maréchal Pétain. « Qu’a changé la Libération ? Elle a divisé l’Église. »

2. Qui prétend, au rebours de toute sagesse, avec ou sans le contrôle de la hiérarchie, exercer une fonction prophétique. « La fonction prophétique, expliquait le Père Congar, vise à faire comprendre le sens du temps, des courants et des mouvements qui se font jour dans l’Histoire. » Attention ! avertit Amicus, dans la Bible, « il y avait plus de prophètes de mensonges, complaisants à tous les pouvoirs, à tous les vices, que d’envoyés authentiques».

3. À quoi visent nos réformateurs-prophètes ? Rien moins qu’à sortir de ce qu’ils appellent le “ghetto catholique” et créer une Chrétienté nouvelle, ­dépouillée de ses revêtements anciens. Pour justifier une telle sortie, un tel dépouillement, ils font appel à une distinction dialectique entre “ les structures ” ou réalités essentielles de l’Église et “ la vie ”, ses réalisations historiques. Mais qui va faire la part des choses, au nom de quoi ? « C’est livrer le corps historique, l’état concret de l’Église à la critique du premier venu qui, par spéculation rationnelle, par illumination ou par instinct, prétendra imposer une autre détermination aux structures prétendument hors de cause ! »

« Vous m’accuserez, ajoutait Amicus, de vouloir supprimer toute fonction prophétique, toute réforme ? Je répondrai que les réformateurs et les saints n’ont jamais fait cette distinction. Ils se sont contentés de refuser l’esprit du monde, l’invasion de certains défauts, les abus criants ; ils n’ouvraient pas l’Église au monde moderne, ils la ramenaient à Dieu et, dans ce retour, l’Église trouvait un renouveau nécessaire. Le danger que vous avez bien vu à propos de Luther, mon Révérend Père, je vous adjure de le considérer comme la pire menace qui pèse sur l’Église de notre temps. L’Église n’est pas une théorie abstraite, une structure subsistant par elle-même. Elle est une réalité vivante et indissociable. Son passé est fixé dans ses traits et ne peut lui être arraché, elle ne peut le renier ni en abandonner les vestiges et les documents. » (Amicus, Un prêtre de France, articles de politique religieuse, 1949-1952, nos 76-80)

Et notre Père concluait cet article prophétique en évoquant les eaux de Siloé qui, à Jérusalem, « coulent doucement » pour alimenter la Ville sainte de l’intérieur en cas de siège. Les mépriser reviendra à nous faire conquérir par nos ennemis, attirant sur notre sol « les eaux puissantes du Fleuve [l’Euphrate] sur toute l’étendue de ton pays, ô Emmanuel » (Is 8, 6-8).

L’abbé de Nantes profita de son voyage à Rome en juin 1951 à l’occasion de la béatification de Pie X pour dénoncer le livre de Congar au Saint-­Office, auprès du cardinal Ottaviani, qui l’écouta avec attention et interdit un second tirage de l’ouvrage. Mais le “ réformisme ” congarien ne fut pas condamné en tant que tel, et notre Père le vit avec angoisse gagner avec de plus en plus d’arrogance les sphères pensantes de l’Église de France tout au long des années cinquante.

LE MYSTÈRE DE L’ÉGLISE ET L’ANTICHRIST

C’est ce que, devenu curé de Villemaur, dans le diocèse de Troyes, il constatait dans son étude magistrale de trente-deux Lettres sur “ le Mystère de l’Église et l’Antichrist ” : « S’il s’agissait du communisme mondial et de ses adeptes, ou du fanatisme musulman, dont l’expansion devient formidable, on pourrait dire le danger depuis longtemps découvert et l’adversaire suffisamment démasqué. Mais il sera question ici d’une plus angoissante forme de domination diabolique, celle qui s’exerce au sein même de l’Église comme l’avait prédit saint Pie X et qui agit insidieusement sous son nom, par ses ministres et ses organes, souvent couverte par son autorité, mais toujours en accord et en faveur de ses ennemis du dehors. Toutes ces affirmations, je ne les lance pas à la légère, mais avec crainte et tremblement, parce qu’au bout de dix ans de recherche, je vois maintenant le mal dans sa profondeur. » (Lettre à mes amis n° 58, octobre 1959)

C’est une “ mystique ” nouvelle, faussement chrétienne, « une doctrine apparemment inspirée par la foi mais qui en est la corruption, le progressisme, hérésie nouvelle plus grave que les pires du temps passé, qui ne cesse d’attirer à elle et d’entraîner de nouvelles âmes faute d’avoir été l’objet d’une claire définition et de condamnations absolues... Sonder cette dépravation est un calvaire intolérable : ils étaient nos frères et nous découvrons qu’ils ne le sont plus alors qu’ils le paraissent encore. Ils sont même acharnés à la perte de l’Église, notre commune Mère, alors qu’ils en vivent et parlent en son nom ! » (ibid.)

En cette heure de ténèbres, notre Père voulait éclairer non seulement les fidèles de sa paroisse, à qui il portait tous ses soins et qui était une image pour lui de la grande Église, mais aussi le cercle de plus en plus étendu de ses amis. « Nous sommes dans l’Église comme dans une famille, une grande et heureuse famille, écrivait-il en avril 1961 dans sa Lettre n° 86. Notre demeure est belle ; nous en aimons les chants, les prières, les habitudes et jusqu’aux moindres détails. Tout nous émeut et nous captive parce que tout y entretient et renouvelle cette vie spirituelle qui est le trésor chrétien... »

Tandis que le progressiste « se passionne pour une certaine idée de l’Église et il est trop clair qu’il ne fait partie de cette Église catholique romaine, que pour travailler à la réformer et l’aligner sur l’idée qu’il s’en est forgée. Cela seul le passionne qui se rapporte à ses plans, à ses conceptions, tandis que tout le reste l’ennuie ou fait l’objet de ses railleries. »

L’amour qui brûle au cœur de l’Église est un amour jaloux, qui ne souffre pas de partage, comme notre Père le rappelle dans la Lettre n° 87 : « L’Église n’imitera jamais l’exemple de la Synagogue, partagée entre la fidélité à Yahweh et le culte des idoles, dieux de fécondité charnelle et de bénédictions uniquement terrestres. Épouse sainte et parfaite, elle ne songe qu’à former le Christ dans nos âmes pour nous élever à l’espérance de la vie éternelle... Si notre Église de France erre, toute désorientée, divisée, écartelée dans la poursuite de buts divergents, n’est-ce pas précisément parce que cela n’est plus admis ? »

On croirait entendre le prophète Élie, reprochant à son peuple de “ clocher des deux jarrets ”. Un exemple entre mille : « On organise dans toute la France paysanne, la Coupe de la joie, sur le thème : pain, amour et fantaisie , mais qui saura encore prêcher sur l’autre Pain, l’autre Amour, sans fantaisie malheureusement, qui seuls peuvent donner l’autre et vraie joie ? La fête de la terre mobilise prêtres et chrétiens ; on y célèbre la Messe, mais qu’est-ce que cette Terre que l’on veut fêter ? Fête-Dieu ancienne et fête de la Terre moderne appartiennent à deux univers. On dit qu’il faut les concilier ; en théorie, on peut tout joindre, mais dans l’espace d’un pauvre cœur humain et d’un esprit créé, le mélange n’est pas bon et sera toujours au détriment de l’œuvre surnaturelle. Alors, s’il faut choisir... » ( n° 88, juin 1961)

« LE SECRET DU ROI. »

De lettre en lettre, d’analyse en analyse, c’est tout un traité de l’Église qui s’élabore sous la plume de notre Père, non pas in abstracto, mais pris sur le vif, dans le concret des situations, et il le compose en fils ou en époux aimant, dévoué, qui observe les recommandations du médecin pour soigner ou conserver la santé de celle qu’il aime :

« Leur affection véritable se fie aux conseils de celui qui sait. De même, nous admirons la Sainte Église, mais qui d’entre nous peut prétendre la connaître parfaitement et deviner ses besoins ? Qui peut se faire une idée exacte, totale, définitive, de l’Église de Dieu ? Personne assurément. Personne ne porte en soi, pas même le souverain et infaillible Pontife, le plan, la définition de ce Mystère incarné. Comment donc l’aimer et l’aider, sinon en suivant les diverses lois et commandements qui en garantissent la vie, en expriment la vérité, en orientent le cheminement ? Le vrai chrétien aime et respecte les lois et institutions de l’Église avec un soin jaloux et humble, parce qu’il sait qu’elles expriment, mieux que tout, les conditions de son être, de sa perfection, de son rayonnement. Faute de posséder lui-même tout le secret de cette vie prodigieuse, c’est le secret du Roi, de l’Époux –, du moins comme un bon fils il en suit toutes les prescriptions avec soin. Cette piété, cette obéissance aimante, quelle preuve d’amour vrai ! » (Lettre n° 105)

Là encore, le contraste avec ceux qui prétendent réformer l’Église est flagrant. Et notre Père n’hésite pas à prendre un langage cru, un langage de prophète, pour se faire comprendre :

« Ils sont, qu’on excuse cette comparaison mais elle est plus éclairante qu’un long discours, comme l’amant qui assouvira son prétendu amour jusqu’en blessant, déshonorant, tuant cet être malheureux tombé en son pouvoir, ou encore, et c’est plus expressif encore, comme le dictateur tyrannique qui s’est fait  une certaine idée  du pays qu’il gouverne et le mutile, le torture, pour enfin le remodeler à l’image de ce qu’il rêve. »

On était en pleine guerre d’Algérie, ou plutôt, au printemps 1962, déjà dans le crime d’abandon par de Gaulle de cette communauté historique à sauver, terre de Chrétienté aux prises avec l’islam. « Cette maîtresse, ce peuple, ne sont que le matériau dont il refuse de considérer l’âme, la dignité, la liberté ; dont il refuse d’entendre les cris de douleur, ni de voir les larmes de détresse. Ce qu’il aime c’est son idée à lui, c’est lui-même... Il y a de la même manière des hommes d’Église qui tuent l’Église pour la rendre conforme à l’idée, si belle, si fulgurante, qu’ils s’en font. »

Concluons cette première partie par un extrait de la Lettre n° 129, de janvier 1963. Notre Père se rend bien compte que la grande épreuve se prépare, parce que, au cours de la première session du Concile, la secte progressiste a déjà fait le coup de force, entraînant à sa suite une majorité incertaine. Que faire dans ce drame ? Réponse de celui qui est, pour quelques mois encore, curé de Villemaur :

« Demeurer fils fidèle de l’Église, dans la sérénité, soumis à elle dans tout ce qui convient, et avec un zèle redoublé par l’approche du péril, mais cependant inflexible, inaccessible au doute, aux compromis doctrinaux, ouvertement hostile mais à son rang aux corruptions et infiltrations de l’erreur, ennemi de toute trahison. Un miles Christi, qui résiste et s’oppose à l’immense complot révolutionnaire, au pourrissement progressiste, sans les confondre avec l’Église ni avec la hiérarchie. Et ainsi démasquer l’imposture, y faire obstacle... Maintenir sereinement tout ce qui est juste, vrai, bon, salutaire, tandis que nous accable la longue nuit, n’est-ce pas notre petite part, notre part sacrée à nous qui ne sommes rien ? »

« Nous ne sommes rien », mais lui, tel Daniel se dressant pour prendre la défense de Suzanne, l’épouse fidèle condamnée injustement par les anciens du peuple, en disant : « Je suis innocent du sang de cette femme », ne cessera de plaider la cause de l’Église notre mère tout au long du Concile.

JE CROIS L’ÉGLISE SAINTE

Au cours de ce même mois de janvier 1963, le curé de Villemaur eut connaissance d’un “ schéma pirate ” qui circulait parmi les Pères, composé par le théologien allemand Karl Rahner et son jeune complice Joseph Ratzinger, dont la lecture le laissa stupéfait : tout ce qu’il avait dénoncé dans ses Lettres sur le Mystère de l’Église et l’Antichrist, était donné comme nouvelles définitions de la foi et de la mission de l’Église :

« L’impression qu’il laisse est terrible, c’est celle d’un suicide de l’Église, d’une capitulation devant les autres religions ou idéologies de notre temps. C’est l’effacement et l’évacuation du mystère central de notre foi, celui du péché, de la rédemption par la Croix, du salut par l’Église seule. C’est l’adoption du sens de l’histoire, du progrès cosmique et technique, de l’internationalisme et du socialisme... Plus d’exclusive catholique ni même chrétienne, toutes les religions sont des  pédagogues  qui permettent aux hommes de faire leur salut et de concourir à l’unification du genre humain ; plus de puissance diabolique, plus de malice humaine, plus de ségrégation des brebis et des boucs. Voici enfin révélée la religion universelle, qui contient toutes les autres. » (Lettre n° 132)

Mais l’Église mise ainsi au banc des accusés, c’était plus que l’abbé de Nantes ne pouvait supporter. Alors, deux mois plus tard, sa Lettre n° 134 portait en exergue : « Je crois l’Église Sainte. » C’est cette Lettre que son fervent disciple, frère Bruno, apprit par cœur pour la réciter au Séminaire des Carmes, et pour laquelle il se fit rabrouer vertement par son supérieur :

« La seule pensée d’appartenir à l’Église suffit à renouveler la jubilation de notre âme, car l’Église est sainte, semblable à son Époux Jésus-Christ dont elle a reçu une telle ressemblance qu’il n’y a rien au monde d’aussi beau, d’aussi sage, d’aussi majestueux que son visage et tout son être. Elle est notre Mère, et j’ajoute : elle est l’Épouse unique, incomparable, elle seule est sainte, sage, sublime, laissant loin dans leurs ténèbres décevantes fausses religions et philosophies... »

Après l’éloge des beautés, raisons et vertus, fruits de la grâce, qui nous attachent à elle, notre Père laissait éclater son indignation : « Seul cet amour violent que j’ai pour ma Mère me porte à déchirer, arracher de sur son visage et son corps magnifiquement ornés par Dieu même, les oripeaux infâmes, les voiles souillés et sacrilèges dont le Monde et le Siècle prétendent les recouvrir... De siècle en siècle ont paru d’étranges docteurs et prophètes de Mensonge. Peut-être jamais comme en notre temps, ils n’ont répandu à grand bruit et grands gestes des doctrines, des liturgies, des méthodes nouvelles, inspirées ou imposées par le Siècle présent et le Monde d’où ils venaient. Ils se disent l’Église, et qui ne les croit pas se voit déclaré schismatique. Alors leur propagande couvre le murmure des eaux calmes de Siloé, prières et gémissements des saints. »

Et notre Père concluait : « J’irai maintenant jusqu’au bout de mon cri. Je plaiderai pour ma Mère. Il y a chez nous trop de petits enfants qui crient et trépignent parce qu’on leur a enlevé leur Mère et qu’on veut les jeter dans les bras d’une prostituée. » Mais cette marâtre, la secte conciliaire qui vient de prendre le pouvoir à la faveur du Concile, « ignore et ses courtisans avec elle, de quel amour profond, sûr, secret, le Christ et l’Église, l’Époux et l’Épouse s’aiment mutuellement et combien leurs enfants sont heureux auprès d’eux, sans rêver de meilleur bonheur, éprouvant aux moindres alarmes la terreur de voir surgir l’Étranger, le Ravisseur ! »

Voilà le secret de notre Docteur mystique de la foi catholique qui, de tout son être, était comme “ niché ” au cœur de l’Église. La Lettre suivante n° 135 était de même force prophétique, de même ferveur mystique. En deux petites pages, c’était tout un traité de l’Église, « Cité de tradition et de liberté », capable de redonner à des générations de séminaristes l’amour vrai, intelligent, engageant, de l’Église.

« J’AIME L’ÉGLISE »

Il en fut de même tout au long de ces années du Concile, en ses quatre sessions successives : à chaque attaque contre l’Église, qu’elle soit frontale ou de biais, l’abbé de Nantes trouvait la parade et la contre-proposition, manifestant tout autant sa défense de la foi dans l’Église que sa foi même en l’Église si critiquée de l’intérieur, car « la Révolution n’est pas l’Évangile et la Secte progressiste n’est pas l’Église » (Lettre n° 146).

Chassé en septembre 1963 de ses paroisses par l’évêque de Troyes, rallié à son tour à la nouveauté conciliaire après avoir courtisé le pouvoir gaulliste, notre Père n’en écrivait pas moins : « Je prends la liberté sacrée de garder et défendre la foi qu’on m’a enseignée, la vraie, d’exiger le respect de la morale du Décalogue, la seule amie du pauvre genre humain, de réconforter, éclairer et soutenir cette élite catholique et française dont on foule aux pieds la pensée et le cœur, alors qu’elle est la grande réserve d’énergie et de dévouement où puise encore une Église qui s’acharne contre elle. »

Mais il ajoutait humblement : « J’ai besoin de vos prières. On ne trouve Dieu que dans l’Église et par elle. Toute vie loin d’elle est un désert. Qu’une chaîne d’amitié et de prières me garde chaudement dans sa communauté alors même qu’en apparence j’en suis tenu éloigné... »

Un tournant décisif se produisit durant l’été 1964, quand Paul VI annonça ses intentions dans sa première encyclique au titre significatif, “ Ecclesiam suam ”, publiée le 6 août 1964. Quelques jours auparavant, le 16 juillet, notre Père revenait sur la “ grande mue ” préconisée par le Père Congar en 1950. Parce que ses vues sont devenues « le Manifeste de l’aile marchante du Concile. On s’explique que celle-ci n’ait donc plus qu’une pensée, qu’une volonté : changer l’Église, la faire pivoter, la ressourcer, l’ouvrir, la remodeler, la briser, la démolir, la reconstruire, pauvre Mère ! pour enfin la rendre aimable à l’Homme adulte de notre temps et donc lui faire retrouver ainsi sa  Tradition profonde  et sa fidélité à sa Source... Naître à la vie de Dieu par le baptême n’est qu’une insuffisante approche juridique ; il faut aussi, et bien plus, naître au Monde pour se purifier des tares et des imperfections de l’institution ecclésiastique et entrer dans la vraie charité universelle. » (Lettre n° 176)

De tels principes conduiront l’Église à une ruine certaine, annonçait notre Père. D’où, en réponse, sa Lettre n° 178, du 6 août 1964, qui commençait par ces mots :

« J’aime l’Église ! C’est en elle que je suis né à la vie véritable, que j’ai grandi, que j’espère atteindre un jour à la stature parfaite de l’Homme nouveau... C’est en vertu de cet amour, de cette admiration, de cette piété dont déborde mon cœur reconnaissant, que je proteste contre la distinction que la théologie moderne doit au Père Congar, entre les structures immuables de l’Église et ses superstructures accidentelles et réformables... Ce réformateur, sincère mais d’intelligence courte, ce professeur qui n’a jamais été pasteur d’âmes n’a pas vu ce qu’avait d’offensant pour l’Église, il n’a pas senti ce qu’avait de blessant pour les fidèles cette dissection annonciatrice d’­­effroyables lacérations. Je n’aime pas un squelette ni des organes vitaux, j’aime Son visage, Son vêtement chatoyant et jusqu’à Sa sandale, tout Elle-même. Avec le Cantique spirituel, je chanterai le cheveu de Son cou qui nous a charmés nous aussi, ses enfants, comme il a blessé d’amour le cœur de Son Époux. Ah ! que celui qui aime l’Église comprenne ! Dans ses traits et ses gestes les plus infimes, un je ne sais quoi d’exquis nous a ravis dans les hauteurs de son Mystère essentiel. C’est pourquoi je hais ces iconoclastes qui ont projet de la tondre, la mettre à nu, lui imposer leur chirurgie esthétique, à leur mode, au siècle de Picasso et de Le Corbusier ! »

Ce même jour, fête de la Transfiguration de Notre-Seigneur, le Pape publiait son encyclique programme, Ecclesiam suam, qui s’annonçait d’un réformisme congarien et d’un progressisme résolument audacieux, le même que l’abbé de Nantes dénonçait : « Je la lus, écrira-t-il, et je discernai dans cette charte du pontificat l’annonce et le programme d’immenses malheurs, d’irréparables destructions. De ce jour, j’ai commencé le combat du fils contre son Père, du prêtre contre le Pape, il ne s’en conçoit pas de plus cruel. »

Notre Père en fit le commentaire systématique dans ses Lettres nos 181-182, dénonçant dans le dialogue institué par le Pape, même à l’égard de nos pires ennemis, les communistes persécuteurs de chrétiens, une trahison de la Chrétienté, pour tout dire : une apostasie. Tandis que Mgr Le Couëdic faisait un autre commentaire à sa façon : « Ce monde qui lui est cher, l’Église l’a en quelque sorte épousé », notre Père lui répondait : « L’épouse virginale de Jésus-Christ a donc épousé aussi, en quelque sorte, le Monde. A-t-elle pour cela divorcé d’avec son premier mari ? Est-elle bigame ou adultère ? »

Au milieu de ce même mois d’août 1964, pour la fête de l’Assomption, notre Père se tournait vers la seule Épouse fidèle, Gardienne de la Foi, notre Mère à tous, l’Immaculée. Le recours à la glorieuse Reine de la Chrétienté, qui fait l’objet de la Lettre n° 179, est une assurance infaillible : « Votre leçon nous sauve des mirages de l’Antichrist qui vous est tout entier contraire, Vous êtes l’Épouse des noces éternelles, alors qu’il prétend nous réduire à l’esclavage de la Cité terrestre. »

C’est Elle qui donnait à notre Père la force de combattre le “ bon combat ” de la foi, à l’encontre de tous les “ tranquillistes ” de bonne conscience : « Car Dieu ne donne sa grâce qu’à ceux qui luttent et toute l’histoire de l’Église illustre les grandeurs de Dieu dans l’éclatante blancheur de ses vierges, l’or précieux de ses dévoués serviteurs et la pourpre de ses martyrs. Il faut combattre. » (Lettre n° 188) Le combat devenait de plus en plus âpre, puisque c’est en octobre de cette année 1964 que notre Père, pour la première fois, prononça l’accusation majeure d’hérésie.

L’HÉRÉSIE EST AU CONCILE

C’était à propos du schéma sur la Révélation, âprement discuté dans l’aula conciliaire. Les novateurs prônaient une autre manière de croire, de connaître la Parole de Dieu, tout immanente, supprimant toute connexion, toute médiation historique, hiérarchique, dans la transmission de la foi, pour tout dire, une foi moderniste. Celle-ci n’était plus la vérité d’une doctrine claire et précise dont le Magistère a la garde et doit assurer la tradition, elle était devenue « une vie, un mystère, une conscience chrétienne, des expériences divines dont la hiérarchie n’a qu’à être le récipiendaire et le témoin, à charge pour elle de bien faire ce travail de représentation des masses divinisées, en s’aidant de l’Écriture.  Aime, et crois ce que tu veux ”, enseignait le Père de Lubac ; maintenant nous savons que les évêques et le Pape sont faits pour t’écouter, dire ta croyance et la transformer en dogme du moment ! Selon les novateurs, le Concile ne parle qu’au nom du Peuple et la fidélité à Dieu passe par cette auscultation du Mystère de ce Peuple où vit le Christ et dans lequel il se révèle. [c’est exactement l’idée majeure du prochain Synode voulu par le pape François !] L’hérésie est au Concile. » (Lettre n° 186)

Et pourtant, écrivait notre Père dans la Lettre suivante, cela ne le faisait pas broncher, et nous non plus soixante ans après, dans notre foi en « la Sainte Église romaine, alors que j’en éprouve vivement toute l’humaine fragilité. J’en suis ! et j’y crois ! et j’y veux demeurer attaché jusqu’à la mort ! Rien ne pourra jamais, que Dieu m’entende, m’éloigner tant soit peu de son Credo ni me faire douter de son Autorité, de sorte que si quelqu’un parvient à me retrancher par violence de sa Communion et me jeter dehors, ce sera comme un lambeau de chair vivante arraché à sa chair, et je resterai sur le seuil, avec les saints de l’Ancien Testament qui veillent aux portails de nos cathédrales.

« Comment en sommes-nous arrivés là ? se demandait encore notre Père. Quel Adversaire s’est glissé entre nous, pour séparer les fils d’avec leur Mère ? En ces vingt ans de vie dans l’Église, tout à son service et dans son amour, qui a changé, d’Elle ou de nous, qui a trafiqué le contrat de notre don mutuel ? Nous pouvons nous rendre ce témoignage que nous sommes restés fidèles à ce qu’Elle nous a enseigné naguère comme des vérités éternelles.

« J’en reprendrai bientôt l’histoire et la preuve... » (Lettre n° 187, pour la fête du Christ-Roi)

L’ÉGLISE N’EST PAS LE MASDU

Et ce fut la suite passionnante sur L’Église et le Masdu, écrite au printemps 1965, entre la troisième et la quatrième session du Concile. L’abbé de Nantes avait déjà, dans sa Lettre n° 197 sur le Monde moderne, démasqué l’hérésie du pape Paul VI, « à laquelle je me suis contenté de fixer un nom, comme on épingle brusquement, pour l’immobiliser, un beau papillon de nuit afin de l’observer », à savoir : le Mouvement d’Animation Spirituelle de la Démocratie Universelle.

Alors, dans sa Lettre du 19 mars 1965, pour la Saint-Joseph, il montre qu’il faut choisir : « Nous avons foi en l’Église, non celle d’hier mais celle de toujours, non celle de nos idées ou de nos rêves mais l’Église une et unique, sainte, catholique et apostolique dont le Siège est à Rome, l’Église de Paul VI, non une autre. Nous n’avons de ferme espérance pour notre salut et celui du monde entier qu’en elle, nous l’aimons de toute notre âme, nous voulons vivre et mourir en elle et, selon qu’il plaît à Dieu, pour elle...

« Mais nous n’avons ni foi, ni espérance ni le moindre amour pour le Masdu. Ce projet d’une nouvelle et universelle religiosité dont l’Église se ferait l’organe, au service de la Cité humaine à bâtir, ce Mouvement d’Animation Spirituelle de la Démocratie Universelle n’a rien qui nous charme. Tout en est emprunté, c’est trop clair, à la théosophie maçonnique et, sous les symboles chrétiens, en demeure profondément ennemi de Jésus-Christ, incompatible avec sa Révélation. Délire, billevesées sanglantes, inversion cent fois condamnée de la vraie religion, le Masdu ne saurait nous inspirer que méfiance et répulsion. » (Lettre n° 199)

D’autant que la charte de ce Masdu est la liberté religieuse, que tout l’effort des progressistes au Concile tentait à imposer, et qu’ils réussirent à faire promulguer avant sa clôture, par la déclaration “ Dignitatis Humanæ ”. Mais l’abbé de Nantes en avait déjà averti ses amis lecteurs au terme d’une étude décisive, à laquelle personne ne trouva jamais à redire : « Cette nouveauté contredit le dogme catholique. » (Lettre n° 209, 22 juillet 1965)

Concrètement, sur le terrain, qu’allait-il se passer ? Notre Père faisait au même moment cette analyse, qui s’est vérifiée à la lettre : « Dans un mois va reprendre ce funeste Concile, funeste si nous le jugeons à ses fruits, selon le conseil du Seigneur. Les textes importent moins que ce qu’on en tire, avec le consentement tacite de la hiérarchie, ce qui en résulte dans la vie quotidienne de l’Église, dans sa prédication générale, dans sa foi vécue. C’est de cela que, par-delà des textes bien balancés, nos Pasteurs demeurent responsables. Le principe officiel du Concile a été et demeure cette inquiétante adaptation de l’Église au monde qui dépossède la foi, et Dieu ! de sa pleine et unique souveraineté. De ce fait, le mouvement du Concile est devenu celui d’une évolution fiévreuse vers la nouveauté, que l’aile marchante prétend justifier par le développement normal d’une tradition vivante et la nécessité continuelle de réformes secondaires. Mais le but et le terme de ce mouvement apparaissent déjà non comme une évolution, mais une révolution introduisant dans l’Église une contradiction mortelle entre son passé infaillible et son faillible présent : Teilhard au lieu de saint Thomas d’Aquin. » (Lettre n° 210, 5 août 1965)

Tout est dit dès 1965, avec quelle clarté et quelle force ! même le mot de « suspicion légitime », qui définit encore notre attitude actuelle dans l’Église : « Nous proclamons qu’il y a équivoque et nous tenons cette Autorité en suspicion légitime. Elle ne saurait nous le reprocher. Si ses intentions sont pures, il lui sera facile de nous rassurer, non par des paroles doucereuses mais par des actes et des décisions efficaces. »

APPEL AU MAGISTÈRE DE L’ÉGLISE

Dans la quatrième Lettre de la série sur le Masdu, écrite le 13 mai 1965, l’abbé de Nantes revient sur cet écartèlement mortel qui divise, au sein d’une même et unique Église, les tenants de deux religions, « ceux qui mettent l’Église au service du Monde et de l’Homme, ceux qui veulent la garder au seul service de Dieu et de Jésus-Christ ». Qui jugera entre les deux, qui tranchera ? La réponse jaillit, lumineuse :

« L’Église est une communauté de foi, formée par l’œuvre d’autorité du magistère infaillible ; c’est précisément ce qui distingue cette société humaine de toute autre, qu’elle repose uniquement sur le lien sacré de la foi ecclésiastique. Les frontières du peuple chrétien sont d’abord et visiblement celles de la foi, enseignée par la hiérarchie et ouvertement tenue par les fidèles. C’est dire la nécessité, la dignité, la responsabilité de nos Pasteurs... Une telle doctrine, que nous professons [définie infailliblement au premier concile du Vatican], fait dépendre tout le sort de l’Église de l’enseignement dogmatique et moral, traditionnel, du Pape et des évêques. Nous avons besoin qu’ils exercent leur mission souverainement, et loin de rien soustraire à leur domaine, nous les prions de nous dire la Vérité de Jésus-Christ, en morale conjugale, sociale et politique, comme en tous les points du dogme et de la ­mystique. » (Lettre n° 204)

À la suite de son étude sur “ l’Église et le Monde ”, notre Père fut sollicité pour prononcer une conférence devant un club politique français, “ Les Montagnards ” (sic !), qu’on trouve retranscrite dans la Lettre n° 211. L’envoi qui la conclut, à l’adresse du Saint-Père et des Pères du Concile qui s’apprêtent à se réunir pour leur dernière session, témoigne, vingt ans après le sermon au séminaire, d’une remarquable continuité :

« Notre foi surnaturelle en Vous, en Votre Magistère, nous rassure : Vous ne pourrez jamais, le ­voudriez-vous même de toute votre volonté humaine, le croiriez-vous vrai de toute la force de vos opinions et la ferveur de vos intentions généreuses, jamais vous ne pourrez enseigner infailliblement, au nom du Seigneur Jésus, l’erreur pourtant déjà répandue parmi vous. En portant ces questions au voisinage du Trône de Pierre, vous vous êtes contraints à proclamer la Vérité de l’Évangile, ou bien à la renier et vous perdre. Or l’Évangile déclare anathème tout Évangile nouveau contraire à sa tradition fidèle par l’Église.

« Anathèmes donc ceux qui annoncent venu le temps de la paix universelle et de la réconciliation de tous les hommes, dans la neutralité religieuse et l’indifférence, accordant ainsi le Christ et Bélial !

« Anathèmes ceux qui prônent des principes tout humains de salut pour le monde, étrangers à Jésus-Christ et à son unique Église !

« Anathèmes ceux qui considèrent le progrès scientifique et social des temps modernes comme la construction même du Royaume de Dieu sur terre et appellent l’Église à se faire, en accord avec les autres religions, la servante de ce Monde !

« Si quelqu’un d’entre vous contestait ce triple anathème, il ne le pourrait qu’en se séparant de l’Église et en dressant Évangile contre Évangile... Toute votre autorité vous vient du Maître que vous servez, et non pas du Monde. Nul ne peut servir deux maîtres. Les péripéties de ce drame, les étapes de ce dénouement ne nous sont pas connues... Mais le jour viendra infailliblement où l’Esprit-Saint et l’Église dénonceront cette formidable hérésie implantée au cœur même de la Cité de Dieu. Ce sera peut-être sous la contrainte des châtiments divins ou simplement dans les malheurs que nos folies auront provoqués. Éminentissimes Seigneurs et Pères, nous avons hâte d’entendre des vérités ­libératrices... »

Il faut lire aussi la Lettre n° 212 sur l’autorité du Concile. Depuis son ouverture, l’abbé de Nantes s’était posé la question : est-il revêtu du caractère d’infaillibilité que possèdent habituellement les Conciles, tel qu’en conscience, on doive admettre ses conclusions ? La réponse, confirmée tout au long des débats, est : non, le Concile n’a pas réuni « les conditions de travail humain, de soumission rigoureuse au dépôt de la foi, de précision et de clarté qui seules autorisent l’assurance d’une garantie infaillible de Dieu ». Au contraire, il a manifesté une sorte de prophétisme et un illuminisme plus qu’inquiétant, qui permettent de remettre en cause l’aggiornamento immense qu’il a osé mettre en œuvre, en rupture avec la tradition. La démonstration est implacable.

Le Concile achevé, par le triomphe des réformistes qui avaient pour eux le pape Paul VI, il fallait, non seulement entreprendre un bilan, mais aussi préparer la contre-offensive. « Je compte, annonçait l’abbé de Nantes, montrer la constante dualité d’interprétation des textes promulgués, l’une restrictive et orthodoxe, l’autre moderniste et contraire à la Tradition. Un immense travail d’élucidation est à entreprendre pour faire obstacle aux thèses révolutionnaires et aider au triomphe éclatant de notre Foi Catholique Romaine.

« Tout ce travail ne se fera pas sans grandes difficultés, sans périls et sans drames. J’ose vous recommander à l’approche de nos tribulations une grande sagesse, de la patience, une religieuse modération. Il faut se soumettre aux autorités de l’Église et leur obéir en tout ce qui est légitime. Seul échappe de droit aux décisions des hommes l’immense domaine de la Doctrine sainte et seul l’exercice sacré de notre foi, de notre espérance et de notre charité dépasse les contraintes de l’obéissance. » (Lettre n° 219, 11 décembre 1965, p. 8)

AU CŒUR DU CYCLONE

Les évêques de France, irrités par les critiques véhémentes d’un simple prêtre qui osait se dresser seul contre leur grande œuvre de Réforme, avaient décidé, au dernier jour du Concile, de le faire taire. D’une manière brutale, Mgr Le Couëdic écrivit à notre Père, le 10 décembre 1965, pour lui intimer l’ordre de quitter le diocèse et de cesser la publication de ses “ Lettres à mes amis ”, sous peine de suspens a divinis.

Notre Père répondit, dès le 19 décembre, à son évêque. Ce fut la première supplique officielle, le premier échelon de son recours au Magistère de l’Église :

« Si je me rendais, non pas à vos raisons, vous ne m’en donnez pas, personne ne m’en donne de source autorisée, mais aux terribles menaces de votre pouvoir spirituel, si je cédais à votre ordre de me taire et de me soumettre à cette évolution, à cette mutation de l’Église, si j’acceptais d’entrer lucidement dans cette mystification qui en est le rideau de fumée protecteur, je ne le pourrais sans perdre ma foi en l’Église sainte de Jésus-Christ. Le scandale cesserait, mais ce serait au prix d’une chute sans remède. Pour accepter le cours des choses actuelles, il me faudrait identifier l’Esprit-Saint avec la rouerie du parti moderniste, la sainteté de l’Église ma Mère avec la fièvre d’adultère et de prévarication qui sévit partout, le gouvernement divin avec la sordide diplomatie, l’universelle démagogie qui coulent à pleins bords. Ça, l’Église ? mais on ne peut l’admettre sans perdre la foi ! »

D’où la demande de jugement qui constituait le corps même de la Lettre, jugement de lui-même et de ses œuvres, que l’abbé de Nantes adressait à Rome, par voie hiérarchique, et que l’évêque de Troyes avait donc obligation de transmettre :

« Cette étude de mes écrits, leur confrontation avec la foi de l’Église, Vous ne voulez peut-être pas, Excellence, les mener Vous-même à leur terme, parce que précisément Vous n’êtes passé à la religion nouvelle qu’en apparence, par soumission extérieure. Alors, pourquoi ne remettriez-Vous pas cette indispensable étude, préalable à toute sanction, cet examen de la cause, aux promoteurs connus et résolus de cette Réforme qu’ils ont juré d’imposer de vive force à l’Église ? À eux de préciser l’antagonisme de la foi nouvelle et de mon traditionalisme. »

Et notre Père terminait son appel par cette merveilleuse profession de foi : « Nous ne sommes pas la Foi de l’Église, mais nous en sommes la Fidélité. Nous n’avons pas l’Intelligence des mystères, mais nous en sommes la Mémoire vivante... La lumière vient de Vous seuls qui êtes l’Église enseignante ; le salut, l’initiative de la conversion des cœurs et de la paix retrouvée ne pourront venir que de Vous, les Pasteurs, et non pas de nous, les brebis. Nous attendrons fidèlement, sans sédition, sans mouvements désordonnés, mais en tenant ferme dans notre foi, que l’Église se retrouve elle-même, telle qu’elle nous vient du fond des âges, après ce temps d’étourdissement et d’illusion qui est le nôtre. »

L’évêque demeura sourd à une si poignante supplique. Il menaça d’interdit, finalement se radoucit, grâce à une démarche de conciliation. Notre Père accepta de lui soumettre ses écrits, mais toujours dans la pensée qu’il faudrait en référer à Rome. En avril suivant, il rencontra à cette fin le cardinal Lefebvre, membre assesseur du Saint-Office et ­président de l’Assemblée des évêques de France, qui tenta de noyer le poisson et, n’y parvenant pas, conclut l’entretien par le fameux : « Tu en as appelé à César ? Tu iras à César », qui assimilait notre Père à saint Paul jugé par le gouverneur Festus (Ac 25, 12) !

Il était alors question d’un formulaire qui expliciterait les points en litige en vue de le porter devant le Tribunal de la Foi à Rome, et notre Père écrivait : « Arrivés à ce point, beaucoup d’amis, non des moindres, bronchent dans leur foi en l’Église :  Ce formulaire, l’obtiendrez-vous jamais d’un nouveau Tribunal dont la maxime est de ne plus condamner personne ? Je réponds avec confiance qu’il faut toujours avoir foi en l’Église ! Nous le lui demanderons avec insistance, avec véhémence : qu’elle remplisse son rôle imprescriptible de Juge de la doctrine et des œuvres, qu’elle le fasse en des décisions claires et non équivoques, catégoriques et non plus persuasives, canoniques et non gratuites ou arbitraires. Alors nous nous soumettrons, répétant les paroles simples et bouleversantes de l’Apôtre saint Pierre :  Ô Église, à qui irions-nous ? Vous avez les paroles de la vie éternelle ! ” » (Lettre n° 227, 5 mai 1966)

Avec une telle foi chevillée au cœur, au milieu de la grande apostasie et grande indifférence moderne, notre Père et ceux qui le suivaient étaient en paix, « au cœur du cyclone », qui ravageait tout autour, à l’abri de l’arche, non pas celle de Noé, mais celle de la Vierge Marie, son Cœur Immaculé.

LE PROCÈS ROMAIN

Le 16 juillet 1966, l’abbé de Nantes achevait de rédiger sa requête au cardinal Ottaviani, pro- préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi, deuxième échelon de son recours à Rome. C’était de nouveau un monument de foi et de doctrine, qui suffirait à le proclamer “ témoin fidèle ” en nos temps d’apostasie :

« Éminence, est-il possible de demeurer fidèle à sa Foi et soumis à ses Pasteurs, en restant comme à l’écart de cette grande mutation de l’Église ? Si oui, pourquoi nous imposer tant de contraintes ? Si non, il faudra admettre que le christianisme authentique est mort et qu’une nouvelle religion est née de lui. L’alternative suffit à ébranler l’autorité des novateurs, qui donnent un caractère essentiel à leurs réformes superficielles et ravalent l’essentiel inchangé au niveau des opinions libres. Nous refusons un tel bouleversement, selon la maxime reçue : In necessariis unitas, in dubiis libertas, in omnibus caritas. Unité dans les choses nécessaires et essentielles, liberté, diversité dans les opinions et coutumes, charité en tout et à l’égard de tous. »

Pour dirimer l’angoissante alternative, concluait notre Père, « l’heure est venue, pour l’Église de Rome, Mère et Maîtresse de toutes les Églises, d’opérer avec puissance et décision une œuvre indispensable de discernement des esprits », afin de savoir entre les différents  “ Esprits ” « qui se disputent l’Héritage du Sauveur : où est ­l’Esprit-Saint de Dieu et où est l’Esprit du mal ? »

Comme Mgr Le Couëdic refusait de transmettre la Lettre, au mépris de tout droit, l’abbé de Nantes reprit sa liberté : premier acte de soustraction d’obédience, parfaitement légitime, non seulement il envoya sa requête directement à Rome mais il la publia. C’est pour cette raison que l’opposant officiel, le seul ! à la Réforme conciliaire fut déclaré par son évêque suspens a divinis, c’est-à-dire privé du droit de prêcher et de distribuer les sacrements dans les limites du diocèse de Troyes. C’était le 25 août 1966, quarante ans jour pour jour après la lettre de l’archevêque de Bordeaux, le cardinal Andrieu, qui avait provoqué la condamnation de l’A. F.

L’année suivante, comme le “ Procès romain ” n’était toujours pas enclenché, notre Père s’adressait au troisième échelon, celui du Saint-Père. La Lettre à Paul VI, qui ouvre en octobre 1967 la série des numéros de la Contre-Réforme Catholique (nos 1 et 2), contient à elle seule la matière d’un traité de l’Église, scrutant à fond l’idée de Réforme, la “ vraie ” et la “ fausse ” pour employer la dialectique même du Père Yves Congar. Car si on peut toujours réformer les hommes d’Église, l’Église, Elle, n’est pas à réformer. C’est même un péché que de prétendre le faire : « Le grand péché de l’Église moderne, c’est sa Réforme. »

Et notre Père de conclure à l’adresse du Pape :

« Nous sommes Vos fidèles et obéissants serviteurs dans tout ce qui relève de la sainte Réforme des mœurs et de la condamnation des erreurs qui infestent le Corps de l’Église, en sa Tête et en ses membres, en nous tous, pécheurs. Et plus encore nous sommes Vos fils affectueux et confiants pour la grande œuvre de Contre-Réforme qui marquera le relèvement et le progrès miraculeux de l’Église en cette seconde moitié du vingtième siècle. »

Pour le dix-neuvième centenaire du martyre des saints Apôtres Pierre et Paul, le Pape avait décrété une année de la foi, qui s’ouvrit le 29 juin 1967, ce qui nous vaut une des plus belles Lettres de notre Père ( n° 248), précisément sur la Foi, avec en exergue la parole du prophète Osée : « Sponsabo te mihi in fide. » (Os 2, 20) La vraie foi de l’Église n’est pas libérale, « elle refuse tout mélange d’erreur et toute sollicitation d’hérésie, de schisme ou d’apos­tasie qu’elle ressent, selon le langage biblique, comme un adultère spirituel, comme une idolâtrie ». Et de conclure : « Qui donc appartient encore à l’Église ? Nous l’allons voir. Nous le saurons cette année. »

De fait, l’année n’était pas écoulée que notre Père était convoqué, en avril 1968, à Rome pour y être interrogé et jugé devant le Saint-Office, rouvert exprès pour lui ! ses écrits ayant été examinés minutieusement depuis l’envoi de sa lettre au cardinal Ottaviani.

« Émotion et tristesse poignante, racontera-t-il, d’être suspect à Rome pour la seule et unique raison que je n’accepte pas de renier la foi de toujours ni l’Église des siècles pour la mode d’un Concile perturbateur et la Réforme capricieuse et intolérante du Pape d’un jour... Mes juges et les consulteurs qui les servent, ô paradoxe, ont tous exactement la même foi que nous mais, dans les hauteurs où ils sont, ils trouvent des accommodements sécurisants entre la foi et la mode, entre les volontés du Pape et la Loi de Dieu. Ils me somment d’en faire autant. Que je rétracte mes critiques, que je me repente de mes accusations contre Paul VI, Vatican II et l’Épiscopat français ! Ils m’exhortent à entrer dans le mouvement général sans pour autant abdiquer en mon for intérieur nos convictions sacrées, bien sûr, à eux comme à nous ! Je refuse ce méli-mélo inconséquent, intenable ailleurs qu’à Rome. »

Comme notre Père donc refusait l’odieux marché, par loyauté et motif de foi ! il lui fut notifié l’année suivante (10 août 1969) qu’il était « disqualifié », ce qui ne veut rien dire dans un tel Procès. Aucun jugement doctrinal n’avait été rendu ni aucune sanction canonique réelle n’était venue frapper le principal opposant à la Réforme. C’était la preuve, négative certes mais certaine, de l’infaillibilité de l’Église.

Concluons ce trop court exposé en évoquant la défense de « la foi catholique inchangée, inchangeable, pour cause de perfection divine », qui se manifesta dans la suite de la vie de notre Père par ses trois autres appels à Rome.

« AU FEU DANS LA MAISON DE DIEU ! »

Dès le début, notre Père avait promis d’aller jusqu’au bout de son “ cri ”, de plaider pour sa sainte Mère l’Église jusqu’au dernier recours. Quand on le vit sortir de la basilique Saint-Pierre au matin du 10 avril 1973, entouré de dix religieux et de cinquante amis, représentants d’une “ Légion romaine ” qui approuvait cette démarche singulière, il n’était rien du tout, disait-il, « pétris que nous sommes du sentiment de notre indignité, de notre impuissance, de notre non-valeur », et pourtant il avait en mains un Livre, qu’il voulait remettre entre les mains du Souverain Pontife ; un Livre renfermant une plainte, une accusation « de schisme, d’hérésie et de scandale » à l’encontre de « notre frère dans la foi, le pape Paul VI », en vue d’un procès canonique régulier. C’est ce Livre qui donnait au prêtre qui le portait, ainsi qu’à sa courageuse petite escorte, leur sérieux, leur importance majeure aux yeux de la foi.

Le Pape était sommé de se juger lui-même, en fonction de sa propre autorité infaillible. C’est un Appel du Pape au Pape, parfaitement canonique. Mais, dit le célèbre “ Décret de Gratien ”, mille fois objecté : « Que nul mortel n’ait l’audace de faire remontrance au Pape pour ses fautes ; car il ne peut être jugé par personne celui qui doit juger tous les hommes... » Or, bien souvent, on omet de citer la suite : « excepté s’il est repris pour avoir dévié de la foi. » Il s’agit de la foi, et l’accusation principale est une persistante et désastreuse « déviance de la foi », autrement dit une hérésie. L’affaire était donc d’importance capitale.

Le Pape devait répondre, il devait juger... en sa propre cause. Il ne le fit pas, il recula devant son devoir de Juge suprême. Ce qui s’appelle en terme de droit : une forfaiture. Un barrage de policiers empêcha l’accès à la porte de Bronze et au palais du Saint-Office. La salle de presse du Vatican parla d’un « geste arrogant et fanatique », mais c’était pour cacher l’embarras, et surtout le refus de recevoir, même matériellement, ce Livre d’accusation, qui aurait engagé l’engrenage d’un procès canonique.

Cette “ démarche romaine ” n’empêcha pas la décomposition mentale et morale de l’Église de ­con­tinuer, le feu de prendre de l’ampleur jusqu’à menacer l’édifice tout entier, mais dans ses  “ Annales ”, qui sont celles du grand Roi et de notre Reine au Cœur fidèle, elle est inscrite à jamais, comme une pierre d’attente pour sa résurrection...

Jean-Paul II régnant, et poursuivant tambour battant l’œuvre de réforme de son prédécesseur par ses discours incendiaires à travers le monde entier, notre Père décida de renouveler son Acte de foi et entreprit une deuxième démarche, écrivit un deuxième Livre d’accusation, qu’il alla porter à Rome, le 13 mai 1983, cette fois entouré de deux cents représentants de la Ligue, avec l’espoir, en frappant à la tête, de réveiller les pasteurs endormis afin que le feu soit enfin combattu ! Cette fois, ce ne fut pas un barrage policier, mais un gros cardinal, dominicain libéral, optimiste et courtisan, qui détourna la plainte, au prix d’un énorme mensonge, et refusa, au nom du Pape, de la recevoir. La forfaiture romaine, renouvelant celle de 1973, était flagrante mais, écrivait admirablement notre Père : « Que nous n’ayons été ni écoutés ni condamnés, témoignera par le silence de l’Église sainte, infaillible, qu’elle reconnut en nous les témoins de son indéfectible Vérité et, plus tard, c’est à ce silence et cette secrète bienveillance maternelle qu’on reconnaîtra sa fidélité sans défaillance à son seul Époux et Seigneur, Jésus-Christ. »

Il y eut une troisième fois, en 1993, sous la forme d’une Plainte à l’encontre du Catéchisme de l’Église catholique, C. E. C. antithèse, s’il en fut, de notre C. R. C. Notre Père fut reçu par un sous-fifre de la Congrégation de la Doctrine de la foi, mais sa demande d’un jugement doctrinal fut de nouveau repoussée. À l’intention de Mgr Sandri qui déclarait quelques jours plus tard à frère Bruno : « J’aime mieux avoir tort avec le Pape que raison contre lui », notre Père répondit, et ce sera notre ­conclusion :

« Soyons sérieux. L’important n’est pas d’être avec le Pape. Être avec le Pape n’a d’autre raison que d’être ainsi, par lui, avec Jésus-Christ. Être contre le Pape n’aurait jamais d’autre raison concevable que de rester avec Jésus-Christ, s’il lui arrivait de s’en séparer, ce qu’à Dieu ne plaise !... Ce qui importe seul, souverainement, aux âmes mystiques, c’est d’être avec Jésus-Christ. Pour la gloire du Père, pour l’amour de cet Époux et Roi plein de majesté, pour l’intime exultation de l’Esprit-Saint en nous, arrhes et gage de Vie éternelle... Car il tombe sous le sens qu’il ne peut y avoir d’union spirituelle véritable au Dieu trois fois Saint sans le zèle ardent, exclusif, nuptial, de l’unique et chaste vérité catholique ! sans l’horreur de toute hérésie comme de tout schisme. » (CRC n° 240, février 1988)

Que le Cœur Immaculé de Marie nous garde de l’un et de l’autre précipice à jamais !

frère Thomas de Notre-Dame du Perpétuel Secours et du Divin Cœur.