Il est ressuscité !

N° 206 – Février 2020

Rédaction : Frère Bruno Bonnet-Eymard


Quand le pape parle !

LA veille de Noël, le 23 décembre, le Saint-Père a répondu aux vœux du Sacré-Collège en rappelant que nous n’avons pas d’autre moyen d’être homme que de nous mettre à l’école de Jésus à Bethléem dans sa crèche par la Médiation de la Vierge Immaculée :

« C’est avec une âme joyeuse, Monsieur le cardinal, que Nous acceptons les vœux que vous Nous avez présentés au nom du Sacré-Collège, et c’est avec reconnaissance que nous recevons l’expression des sentiments de dévouement et d’affection dont vous vous êtes fait l’interprète pour tous en souhaitant que la restauration en Jésus-Christ, par l’intercession de la Vierge Immaculée, soit le présage de temps moins périlleux pour l’Église. Et Nous Nous réjouissons vivement que vous ayez fait allusion à ce sujet, parce que le mystère de Bethléem, que nous allons rappeler, offre les preuves les plus indiscutables du vrai Sauveur ; Sauveur aujourd’hui comme il y a dix-neuf siècles, Sauveur ici comme à Bethléem, Sauveur unique, éternel, universel, qui a renouvelé la face de la terre et qui a rétabli avec Dieu et entre les hommes toutes les relations individuelles et sociales. »

Notre bienheureux Père a établi dans sa métaphysique relationnelle que toute la dignité de la personne humaine tient à ce double ordre de relations à Dieu et au prochain ; que le Christ vient rétablir dans leur perfection à Bethléem.

« La cabane de Bethléem, en effet, nous présente l’homme parfait qui, unissant dans une seule personne la nature divine et la nature humaine, restitue à celle-ci la meilleure partie de ses privilèges, perdue par la faute, et la plénitude des avantages qui en dérivent ; d’où il suit que nous n’avons d’autre moyen d’être homme, au point de vue spirituel aussi bien qu’au point de vue social, que de nous rapprocher de l’homme parfait, de la pleine mesure de la vie du Christ :

« Jusqu’à ce que nous nous soyons approchés en courant de l’homme parfait, que nous ayons atteint à la plénitude de la mesure de l’âge du Christ. » (Éphésiens 4, 13)

Toute la vie chrétienne et sociale ne doit donc être qu’une continuelle étude pour atteindre la beauté du Christ, pour recouvrer ainsi notre dignité et ramener dans le monde, avec les dons originels, l’harmonie, la concorde et la paix de l’Éden. »

Saint Matthieu rapporte que les Mages ont trouvé la Sainte Famille dans une « maison », que le Saint-Père se représente comme une pauvre maisonnette, une « cabane ».

« C’est pourquoi la cabane de Bethléem est une école d’où le divin Rédempteur commence son enseignement, non par des paroles mais par des œuvres, prêchant que l’unique moyen de réhabilitation est le sacrifice dans la pauvreté et la douleur. Les pompeuses théories, les assemblées bruyantes, les discussions des questions brûlantes ne servent à rien. Pour restaurer toutes choses dans le Christ, sans la sollicitude de la science, sans l’aide de la richesse, sans l’intervention de la politique, cette leçon suffit ; et la société, si elle entrait en cette voie, serait heureuse dans la joie et la paix universelles.

« La cabane de Bethléem est une école où nous voyons un César païen devenir l’instrument inconscient de la divine Providence et concourir admirablement à la fondation de l’Église ; ce qui nous montre à l’évidence que Dieu entoure celle-ci de son aide pour la défendre et la conserver. Vraiment, les maux actuels qui l’affligent sont multiples et très graves ; ses ennemis, cachés ou manifestes, sont nombreux et puissants ; leurs moyens de lui porter atteinte formidables ; mais nous ne devons pas céder au découragement parce que, dans les divines promesses, nous puisons la certitude que Dieu procurera toujours le résultat qu’il a déterminé en faisant, comme dit saint Augustin, servir le mal même, produit de notre volonté libre, au triomphe du bien.

« La cabane de Bethléem est une école où l’on enseigne que, pour restaurer toute chose dans le Christ, nous ne devons fixer à la divine Sagesse ni le temps ni le mode de venir à notre secours. Israël attendait depuis quarante siècles l’accomplissement de la promesse de l’Éden ; nous devons donc imiter non seulement la foi des anciens patriarches, mais, et spécialement, celle de Marie et de Joseph, qui, sachant que le Fils de Dieu allait naître à la vie, et que Bethléem, d’où ils étaient si loin, devait être son berceau, sans anxiété et sans crainte attendent avec tranquillité les décrets du ciel. Certainement, cela Nous attriste de voir l’Église de Jésus-Christ persécutée et cruellement combattue dans son autorité, dans ses doctrines, dans sa providentielle mission à travers le monde, et par suite la société civile travaillée de dissensions intestines ; mais quand Nous considérons que nous sommes dans la vallée de larmes, que nous traversons un temps d’épreuve, que l’Église ici-bas est militante et que c’est Dieu lui-même qui envoie ou qui permet les tribulations, il doit nous être facile de suivre l’exemple de Marie et de Joseph, qui, après l’attente paisible, sûrs d’accomplir la volonté divine, laissèrent leur modeste demeure, entreprenant avec d’indicibles embarras un long voyage, et supportèrent avec résignation le refus des Bethléémites qui ne voulurent pas leur accorder un abri hospitalier.

« La cabane de Bethléem est une école. Combien aurait été heureuse la famille qui aurait recueilli en cette nuit les pauvres époux ! Combien de bénédictions seraient descendues sur elle ! Mais pour eux, point de place. « Il n’y avait pas de place pour eux au caravansérail » ; et Jésus vint dans sa cité et les siens ne le reçurent pas. Pauvres peuples et pauvres nations qui, non seulement n’accueillent pas Jésus et son Église, mais qui, beaucoup plus mauvais que les Bethléémites, la gênent dans son action, la persécutent, la calomnient, et avec un aveuglement impardonnable, eux qui savent que leur est réservé le sort de la malheureuse Bethléem.

« La cabane de Bethléem, enfin, est une école dans laquelle, si l’accomplissement des divines promesses n’est pas révélé aux sages et aux prudents du siècle, mais seulement aux petits, c’est-à-dire aux simples pasteurs, ce n’est point que Jésus ait préféré une condition à une autre. La société des hommes est l’œuvre de Dieu ; Dieu lui-même a voulu la diversité des conditions, et Jésus n’est pas venu pour changer cet ordre, en appelant seulement les pauvres, mais il est né pour tous. Cela est si vrai, que, pour manifester ce caractère d’universalité, il a voulu naître dans un lieu public, dont l’accès ne pouvait être interdit à personne ; il a voulu descendre d’un sang royal, pour n’être point dédaigné par les princes ; il a voulu naître pauvre, pour que chacun, sans exception, pût aller à lui, et pour se faire tout à tous, pour que personne ne craignît de l’approcher, il s’est montré sous l’aspect d’un petit enfant.

« L’ange n’a pas annoncé la joyeuse nouvelle aux habitants de Bethléem, non seulement parce qu’ils s’en étaient rendus indignes par le refus de donner asile à Marie et à Joseph, mais parce que, loin d’aller à la Grotte, ils ne se seraient pas souciés de la nouvelle, comme firent ensuite ceux de Jérusalem à l’arrivée des Mages. Et c’est ce qui arrive aussi maintenant quand parlent les anges de l’Église ; et beaucoup parmi les baptisés, chez qui la corruption du cœur étend un voile sur l’esprit, non seulement les raillent et s’en moquent, mais nient les faits les plus évidents, les vérités les plus manifestes, les droits les plus sacrés, faisant vanité de ne rien croire. Comme maintenant aussi, il y avait alors des hommes orgueilleux d’esprit et corrompus de cœur, qui, bien que dépositaires des divines promesses et vivant près du Temple en se vantant de faire partie du peuple élu, n’auraient pas cru à l’annonce faite par l’ange.

« Et cela est si vrai qu’ils ne cédèrent pas à la vérité, même lorsque Jésus rendait la vue aux aveugles, la parole aux muets et ressuscitait les morts ; mais, après avoir été comblés de bienfaits sans nombre, ils l’ont crucifié ; histoire de douleur qui tant de fois s’est renouvelée.

« Or, s’il en est beaucoup qui, tout en célébrant, comme cela se pratique aussi chez les gens du siècle, le retour de Noël avec une joie extraordinaire et par des échanges de vœux, ne profiteront pas des leçons offertes par le mystère de Bethléem pour restaurer toute chose dans le Christ, Nous, Vénérables Frères, déposons tous ensemble à la crèche du divin Enfant nos prières pour qu’il intervienne avec sa grâce et que tous en profitent pour leur salut. Quant à Nous, confiant en Dieu, sûr du concours efficace et affectueux du Sacré-Collège, réconforté par les prières du monde entier, Nous ne demandons que la grâce d’adorer en tout tranquillement les dispositions de la Providence. Nous exprimons au Sacré-Collège, à cœur ouvert, des vœux sincères pour sa prospérité, et, comme gage de Notre affection très particulière, Nous vous donnons, à vous, Messieurs les cardinaux, et à tous ceux qui se trouvent ici présents, Notre Bénédiction apostolique. »

Ami lecteur, vous aurez reconnu la parole d’un saint Pape qui est aux antipodes du Concile, du paraconcile, du postconcile et de tous les synodes qui l’ont perpétué. Je dédie ce texte magnifique de saint Pie X à tous ceux qui sont accablés, mais non pas ébranlés, par la fausse religion que nous imposent par violence et tromperie nos évêques et le Pape à leur tête, depuis soixante ans.

Frère Bruno de Jésus-Marie