2 AOÛT 2020

La Sainte Eucharistie :
Hostie vivifiante, nourriture de nos âmes

L’ÉVANGILE du miracle de la multiplication des pains que l’Église nous donne à méditer en ce 18e dimanche du temps ordinaire nous invite à approfondir le mystère de la Sainte Eucharistie dont il est une préfiguration et que nous revivons à chacune de nos messes.

« Il est réservé aux purs de goûter toute la saveur de l’Eucharistie, comme l’Apôtre saint Jean et Marie-Madeleine surent se rassasier de l’humaine présence de leur Maître. Il faut apprendre à renoncer aux passions propres de la chair, comme si elles n’existaient même plus ; alors la chair ne reste que le moyen admirable et sûr de l’approche des âmes. Bien plus, sevré de tout contact, de toute présence humaine nourrissante, enivrante, l’être chaste connaîtra dans toute sa force quel lien sensible puissant et doux l’Eucharistie établit entre l’âme et le seul Jésus-Christ, fils de Dieu, son Époux et son frère.

C’est le secret de la sainteté du Père de Foucauld : son amour jaloux, passionné, exclusif, prenait sa source et retrouvait toute sa flamme dans cet éblouissement quotidien de la présence corporelle de Jésus dans l’Hostie. Il passait aux pieds de son Dieu fait chair pour être près de lui, à lui, en lui, « la plus grande partie de ses journées et de ses nuits, agenouillé... On n’a pas besoin de voir clair, disait-il, pour parler à Celui qui est le soleil de justice et la lumière du monde ».

Mais l’Eucharistie est un mystère plus grand encore. Le Corps et le Sang ne témoignent pas seulement d’une présence divine, ils transmettent la vie qui vient du Père au Fils et de Lui passe en chacun de nous : « Le pain que je donnerai, c’est ma chair pour la vie du monde... Comme je vis par le Père qui m’a envoyé, celui qui me mange vivra lui aussi par moi, de la même manière ». Les juifs s’étonneront qu’un homme puisse pardonner les péchés, livrer sa chair et son sang en sacrifice et en nourriture : « Comment celui-ci peut-il nous donner sa propre chair à manger ? » Le scandale dure encore.

Mais tandis que l’incrédulité bute encore une fois sur les détails, Jésus affirme les desseins de son amour. Le soldat n’offre-t-il pas sa vie pour les siens au champ d’honneur ? Et la mère ne nourrit-elle pas de sa chair son enfant à naître ? Ne transforme-t-elle pas des aliments communs en son propre lait pour le donner ensuite avec amour ? Ce ne sont que des figures qui ne parlent qu’aux croyants, et de même les symboles prophétiques de l’Ancien Testament, la manne, l’Agneau pascal...

Dans ses généreux desseins, Dieu saura trouver à toute difficulté une solution simple et inattendue ce sera sur l’autel de la Croix et sous les coups des bourreaux que la chair du nouvel Agneau Pascal sera broyée et son Sang répandu. Instrument de rédemption et victime véritable de l’amour, cette chair et ce sang deviennent Hostie vivifiante. « Ma chair est vraiment une nourriture et mon sang vraiment un breuvage ».

JÉSUS se livre à nous en se revêtant des figures expressives de pain et de vin. Loin de nous rebuter, il revêt une forme qui nous parle et nous attire. C’est bien l’agneau immolé dont nos âmes se nourrissent, mais cette chair livrée, ce sang répandu sont là à nos yeux et en notre bouche, pain blanc et vin pur, tout signifiant dans l’apparence ce qu’ils sont en leur substance, les dons suprêmes de JÉSUS à ses amis.

C’est l’extrême pointe du mystère de l’Incarnation que cette ultime approche et ce piège tendu à notre faim et notre soif. Il est venu, comme notre proche ami et notre maître, parlant et guérissant, pour répondre à notre attente d’une présence divine sensible à laquelle s’attachent toutes les plus pures puissances de notre être charnel. Il est monté sur la Croix pour laisser paraître les signes sanglants de notre salut et enrichir sa chair déchirée, son sang répandu, des grâces infinies de notre rédemption. C’était l’Agneau de Dieu, qui donne la vie au monde en portant son péché.

Enfin, le voici devant nos yeux, purifiant notre regard, en nos mains pour être adoré et cru ; il se donne les traits et les apparences du pain corporel et du vin de la vigne, dans tout l’immense pouvoir qu’il a de prendre, sur une simple parole, les apparences de ses désirs et les signes de son pouvoir. Au jour de la création, il a fait pour l’homme le pain de farine et le vin de nos soifs terrestres et d’une seule parole, au jour de l’union de la créature avec son Dieu, il a fait de sa chair le pain des âmes et de son sang leur vin enivrant, comme ils le sont réellement mais manifestés maintenant dans le sacrement eucharistique.

Puisse ce balbutiement autour d’un si grand mystère augmenter en vous la faim et la soif eucharistiques, celles qui donnent la vie éternelle...

Abbé Georges de Nantes
Extraits de la Lettre à mes Amis n° 35 de juin 1958