Il est ressuscité !

N° 215 – Novembre 2020

Rédaction : Frère Bruno Bonnet-Eymard


La guerre

LE Pape achève son encyclique Fratelli tutti  en reconnaissant que « la guerre n’est pas un fantôme du passé mais au contraire elle est devenue une menace constante » ( n° 256). C’est dire que l’encyclique Pacem in terris, du 11 avril 1963, n’a pas “ encore ” porté les fruits escomptés. Cela n’empêche pas François de persévérer dans le déni : « Comme le disait saint Jean XXIII,  il devient impossible de penser que la guerre soit le moyen adéquat pour obtenir justice d’une violation de droits ” » ! ( n° 260)

Il faudrait aller le dire à Erdogan qui multiplie les foyers d’un embrasement général en Méditer­ranée : « Syrie, Libye, Méditerranée orientale, Grèce, Chypre, Caucase... Depuis le début, le président turc joue au pompier pyromane, déclenchant un nouvel incendie dès qu’un autre faiblit. » (Le Figaro, lundi 12 octobre)

Mais à quelle fin ? « Le curseur est évidemment réglé sur le scrutin présidentiel de 2023, qu’il veut à tout prix remporter. » Mais il y a plus.

Samuel Paty, pour avoir présenté à ses élèves de quatrième, lors d’un cours sur la liberté d’expression, deux représentations satiriques de “ Mahomet ”, celles-là mêmes qui furent reproduites dans Charlie Hebdo en 2015, a été sauvagement assassiné par “ décapitation ” c’est-à-dire par l’égorgement rituel, autrement dit le sacrifice humain offert à AllahAkbar, le 16 octobre dernier par un jeune réfugié russe de Tchétchénie, Abdoullakh Anzorov. Ce dernier a aussitôt été abattu par les services de police. Une information judiciaire a été ouverte pour complicité d’assassinat terroriste. Parmi les sept personnes mises en examen, le père musulman d’une élève qui avait porté plainte et mené en parallèle une campagne sur les réseaux sociaux contre l’enseignant. C’est cette campagne qui aurait donné l’idée à ce jeune tchétchène, musulman, installé avec sa famille à Évreux, d’entrer en action, d’acheter un couteau, de se rendre à Conflans-Sainte-Honorine et d’assassiner l’enseignant après se l’être fait désigner par deux collégiens moyennant finance.

« Et l’on ne viendra pas nous dire, cette fois, qu’il est tombé par hasard, sans raison, sous les coups d’un  déséquilibré  ! écrit Alexis Brézet directeur des éditions du Figaro. Au contraire : tout, dans les jours qui précèdent le crime semble conduire à cette tragédie. Durant deux semaines, Samuel Paty a été l’objet d’une cabale méthodiquement ourdie, soigneusement organisée. Des militants islamistes l’ont ciblé, persécuté, calomnié. Parmi eux un  parent d’élève ”, mais aussi un activiste islamiste, fiché S, membre d’un  conseil des imans de France ”. »

Donc c’est clair. Ce crime perpétré par un musulman l’a été pour un motif religieux en suivant cet effroyable rituel islamique de l’égorgement et s’inscrit dans la droite ligne de la série d’attentats perpétrés sur notre territoire depuis 2012. Mais la différence est que cette fois-ci, les musulmans en cause s’en sont pris à cette institution “ reine ” de la République, à son vrai bras armé, c’est-à-dire à cette prétendue Éducation nationale dotée du premier budget de la nation et qui n’a rien trouvé de mieux, pour parler de l’islam à de jeunes adolescents dans le cadre d’un cours d’enseignement moral et civique, que de leur présenter ces caricatures tout simplement obscènes.

Cet attentat a été commis quinze jours après un discours d’Emmanuel Macron, prononcé aux Mureaux, annonçant la discussion, dans les prochaines semaines d’un projet de loi pour lutter contre le “ séparatisme ” : « Ce à quoi nous devons nous attaquer, c’est le séparatisme islamiste. C’est un projet conscient, théorisé, politico-religieux, qui se concrétise par des écarts répétés avec les valeurs de la République, qui se traduit souvent par la constitution d’une contre-société et dont les manifestations sont la déscolarisation des enfants, le développement de pratiques sportives, culturelles communautarisées qui sont le prétexte pour l’enseignement de principes qui ne sont pas conformes aux lois de la République. C’est l’endoctrinement et, par celui-ci, la négation de nos principes, l’égalité entre les femmes et les hommes, la dignité humaine. »

 Séparatisme islamiste ”... Qu’en termes élégants ces choses-là sont dites ! car enfin « à quoi rime, au juste, ce mot de  séparatisme  ? » demande Alexis Brézet dans l’édition du 19 octobre du Figaro. « Le bourreau de Samuel Paty et les militants islamistes, qui ont créé les conditions de son acte, écrit-il, ne nourrissent aucunement le rêve de bâtir leur société islamique à côté de notre République, ils ont le projet de la remplacer, territoire après territoire, par un régime  pur  gouverné par la charia ! Les islamistes ne sont pas des séparatistes, ce sont des conquérants. »

C’est le mot juste ! Il caractérise depuis quatorze siècles la religion coranique elle-même, dans son essence. Car, on aura beau dire, beau faire, l’islam prétend à la suprématie religieuse et politique planétaire fondée sur une prétendue révélation divine qui lui serait propre, celle du Coran révélé à Mahomet par l’ange Gabriel.

En fait de révélation divine, j’ai établi dans ma traduction scientifique des premières sourates du Coran, que cette “ religion ” est le fruit de la prétention d’un homme que notre Père tenait pour un « Himyarite de grande tente », génie religieux et puissant homme d’action, à retrouver, au rebours du christianisme et du judaïsme ! la religion « parfaite » d’Abraham, selon la parole que Dieu lui adressa, « Sois parfait ! » (Gn 17, 2) et que reprend cet homme, l’auteur du Coran, pour l’opposer aux juifs et aux chrétiens.

C’est là la vraie traduction du mot ’islam, qui ne signifie pas « soumission », mais « perfection » ! selon le sens de la racine hébraïque šâlam « achevé, parfait ». L’islam, c’est la « perfection » de la religion voulue par Dieu et « l’accomplissement » de ce qu’annonçaient la “ Torah ” et “ l’Évangile ” ! Rien de moins.

Tel est le thème du Coran. Cette pensée efface la distinction entre Ancien et Nouveau Testaments, source d’inexpiables conflits, et dévolue la religion d’Abraham, de Moïse et de Jésus, simple successeur de Moïse, aux enfants d’Ismaël, les Arabes, en vertu de la stupéfiante affirmation de l’auteur selon laquelle avant Moïse qui donna la Loi aux enfants d’Israël, avant Jésus-Christ simple prophète et successeur de Moïse, Dieu avait fait alliance avec Abraham... et Ismaël, l’ancêtre éponyme des arabes (II, 125) ! Depuis ce jour et jusqu’à aujourd’hui ! le Coran renvoie ainsi dos à dos juifs et chrétiens qu’il voue au feu de l’enfer pour avoir introduit dans l’Écriture des « changements postérieurs » à Abraham, à cette « perfection » primitive d’Abraham, les uns en se prévalant de la tradition de Moïse, les autres en affirmant que Jésus-Christ est le Fils de Dieu.

L’auteur se défend d’apporter ni même de recevoir une révélation nouvelle, mais il brise savamment tout le ressort de l’Histoire sainte en effaçant l’exclusivité de l’Alliance nouée par Dieu avec Abraham et Isaac, l’élection du Peuple d’Israël, pour aboutir à la négation obstinée de la messianité et de la divinité de Jésus-Christ. Car le véritable « Bien-Aimé », selon la traduction exacte du mot muḥammadun, dont Jésus n’était qu’un “ précurseur ”, c’est lui-même, l’auteur ! Suscité par « le Dieu » pour éteindre cette querelle qui opposait chrétiens et juifs depuis six cents ans et enfin rétablir cette religion « parfaite » des origines, à Jérusalem ! en la conquérant sur les chrétiens byzantins ! Voilà l’origine du jihad qui désigne l’action de se « rassembler en bande » armée, selon le sens de l’hébreu gûd (Gn 49, 19 et la suite d’allitérations construite sur ce mot pour évoquer les incursions... arabes précisément ! contre la tribu de Gad installée en Transjordanie), pour monter à la conquête de Jérusalem.

Les musulmans ont perdu l’intelligence des origines de leur religion, de ce dessein génial et profondément antichrist que je retrace au long des trois tomes de ma traduction. C’est ainsi que, cent cinquante ans après les événements fondateurs, toute une légende a remplacé le fait historique par une ­prétendue révélation du Coran apporté du Ciel au prophète Mahomet par l’ange Gabriel.

Mais même ainsi déformé par la sîra, la « légende » musulmane postérieure, demeure l’essentiel qui vient de l’unique révélation divine et qui donne à l’islam sa valeur permanente et sa force spirituelle : le monothéisme, la soumission de l’homme à la loi morale, au Décret divin, l’attente du jugement et de la vie future, le tout présenté dans un souffle prophétique, lui aussi repris de l’unique révélation biblique.

Partant de là, le Coran partage le genre humain en deux catégories : les « fidèles » qui ont embrassé la « religion parfaite » et les « apostats » : juifs et chrétiens, contre qui la guerre est inexpiable. L’islam, contre le christianisme, tend à dominer l’univers avec alternance de victoires et de défaites, de trêves consenties pour assurer les intérêts commerciaux. Mais le but reste et restera toujours le même : sa victoire définitive par l’extermination des « apostats », ou leur réduction en esclavage à moins qu’ils ne se convertissent à l’islam, ce qui est en cours pour beaucoup.

Nous en avons le pénible exemple avec Sophie Pétronin, cette Française retenue en otage au Sahel durant trois ans par un groupe djihadiste. Elle vient d’être libérée moyennant le versement d’une rançon et la libération de plus de deux cents djihadistes, accord négocié par les nouvelles autorités de Bamako au nez et à la barbe de nos forces militaires déployées dans la région. Et elle n’a rien trouvé de mieux que de profiter de cette détention pour faire « une retraite spirituelle » et se convertir à l’islam... Ce fut sans doute pour elle le prix à payer pour sauver sa tête... comme ce sera peut-être le cas pour bon nombre de Français dans un avenir qui n’est pas si éloigné...

La France n’est pas raciste comme l’a toujours expliqué notre Père. « À travers les siècles, des barbares sont venus, maint étranger a fondé, occupé son sol, des gens y auront trouvé l’asile qu’ils cherchaient, le travail dont ils avaient besoin, la patrie de leur esprit et de leur cœur, ils sont devenus Français. Notre pays, notre peuple ont assimilé bien des hordes de barbares et séduit beaucoup de grands étrangers qui les ont enrichis de leur sang, de leurs travaux, de leur génie. D’autres, inassimilés, inassimilables, ont campé, campent aujourd’hui encore sur son sol, qu’il nous faut sagement convertir, conquérir ou expulser. » (CRC n° 198, mars 1984)

Mais force est de constater que la France a connu à partir des années 70 des mouvements migratoires sans précédent, afin de pallier les besoins en main-d’œuvre dont l’industrie manquait alors. Et ces mouvements s’accentuèrent en 1975 par décision du Conseil d’État d’annuler une circulaire ministérielle de 1972 qui conditionnait jusqu’alors l’entrée et le séjour en France des immigrés à l’obtention d’un travail et d’un logement. À partir de cette année 1975, le gouvernement se voyait paralysé au nom des droits de l’homme dans sa capacité à réguler les flux migratoires en fonction des besoins économiques du pays ; toute restriction apportée à l’arrivée de populations étrangères était désormais interprétée comme un acte de racisme, attentatoire à la dignité humaine et à la liberté d’aller et venir. Et la situation n’ira que de mal en pis dans les années 80, avec notamment la fondation par Julien Dray, Bernard-Henri Lévy et Harlem Désir de cette association particulièrement active de « SOS racisme ».

« Un antiracisme de nouvelle génération voit alors le jour, écrit Valeurs Actuelles dans son numéro de février-mars 2020, qui dissimule un authentique projet de société où le migrant – et le musulman en particulier – cesse d’être  un travailleur en quête d’emploi  pour devenir une  victime . Au nom des  droits  de cette victime, l’antiracisme va alors remodeler la société française. Celle-ci, qui professe que l’attachement à la nation prime toute autre considération, cède peu à peu le pas à une autre société, où non seulement l’appartenance ethnique est prise en compte, mais où cette appartenance ethnique est génératrice de  droits . Le piège se referme et, très vite, le problème de l’islamisme perce sous la question de l’immigration. »

Les faits, les dates, tels qu’ils nous sont ici présentés, sont parfaitement exacts et relèvent même du bon sens, mais l’analyse n’en est pas moins insuffisante en éludant une question essentielle et sans laquelle nous risquons une impasse, celle-là même dans laquelle se trouvent aujourd’hui nos institutions républicaines.

Les droits des immigrés, les droits revendiqués par les musulmans en tant que tels ne sont rien d’autre que les droits de l’homme, en fonction desquels sont organisées nos institutions républicaines, toutes chargées de les appliquer et de les faire respecter, et si nécessaire en se sanctionnant mutuellement. Car aucune loi, aucun texte réglementaire, aucune décision administrative, aucune décision de justice ne saurait être prise ou rendue en méconnaissance de ces droits reconnus à tous en théorie, impossibles à appliquer à tous en pratique.

Or, comme notre Père nous l’a expliqué de façon si claire, ces droits de l’homme font de chaque individu ou “ personne ” un sujet autonome de droits absolus, antagonistes entre eux et vis-à-vis de tout pouvoir. Ils établissent la “ personne ” comme origine et principe même de toute souveraineté, de tout pouvoir, de tout droit. Ils sont donc par définition subversifs de tout “ ordre ” humain. C’est au nom des droits de l’homme... et de la femme que désormais les relations entre les époux sont fondées sur une stricte égalité qui entraîne l’anéantissement de l’autorité du père en tant que chef de famille et donc la “ pulvérisation ” systématique de la famille qui est pourtant la cellule de base incontournable de toute vie en société.

Ils sont également subversifs de tout ordre politique et social. C’est au nom des droits de l’homme que la Révolution a mis fin à l’Ancien Régime chrétien par la “ décapitation ” – il est vrai que la guillotine était un moyen plus civilisé qu’un simple couteau – du roi et de la reine et de tous les “ ennemis du peuple ”. C’est au nom des droits de l’homme que se déroulèrent les journées révolutionnaires des 27, 28 et 29 juillet 1830 qui firent plusieurs centaines de morts à Paris et qui provoquèrent l’abdication de Charles X et l’abolition du pouvoir sacral en France. C’est au nom des droits de l’homme que l’armée, la justice, et finalement toute la nation, furent priées de se mettre à genoux comme responsables de la condamnation d’Alfred Dreyfus prétendument innocent du crime de trahison.

C’est au nom des droits de l’homme que le gouvernement de salut national du maréchal Pétain fut anéanti dans l’épuration, la con­damnation et l’assassinat de milliers de Français qui payaient ainsi le “ crime ” de loyalisme au Maréchal et à l’État français. C’est au nom des droits de l’homme que, dans la plus pure tradition dreyfusarde, l’Armée française, en pleine guerre contre le terrorisme FLN à Alger en 1957, eut à subir une violente campagne de dénigrement de ses méthodes et de son action, prélude à l’abandon de l’Algérie en 1962.

Cette brève évocation de notre histoire contemporaine montre à quel point les droits de l’homme sont une machine infernale pour contester toute sujétion, toute hiérarchie, tout ordre, et à un degré tel, ne craignait pas de dire notre Père, qu’  « on a commis en ce pays mille fois plus de crimes au nom des droits de l’homme que par raison d’État et pour cause de salut public ! » (Urgence d’une sagesse politique totale, CRC n° 194, p. 7)

Subversifs de tout ordre humain et politique, les droits de l’homme ne poursuivent pas d’autre but que celui d’ « écraser l’infâme », « de substituer à Jésus-Christ Roi du monde, souverain Législateur, une idole, n’importe laquelle, pourvu qu’Il ne paraisse plus en vainqueur ! Et la meilleure idole, pour perdre le monde dans l’impiété de la grande Apostasie, c’est aux yeux de l’homme (et de la femme), leur propre image, fantastique : l’Homme, la Femme “ comme des dieux ” (Gn 3, 5). »

D’où la dictature, au nom des droits de l’homme, qu’exerce cette laïcité obsessionnelle et sectaire de nos institutions républicaines pour interdire systématiquement, fondamentalement, radicalement à la religion catholique, à l’Église, toute influence dans la vie publique, politique et sociale de la France. C’est au nom de cette laïcité que la République lança à la fin du dix-neuvième siècle une violente persécution contre les religieux de France au point de les exclure des écoles et de toutes les œuvres qu’ils assuraient, de les expulser du territoire national, de spolier les églises pour finir par adopter la loi de séparation de l’Église et de l’État, avec cette volonté affichée de détruire et d’effacer jusqu’au moindre vestige le règne social de Jésus-Christ, refoulé au fond de la conscience individuelle.

Et ce fut un plein succès grâce au “ Ralliement ” ordonné en 1892 aux catholiques français par Léon XIII, grâce à la servilité, à la lâcheté de nos évêques de France, bien loin de prendre modèle sur Mgr Freppel, et finalement grâce à la déclaration Dignitatis humanae adoptée en 1965, l’Église demandant aux États que lui soit seulement appliqué le droit social à la liberté de religion comme elle-même le reconnut à toutes les religions ou irréligions au concile Vatican II.

L’Église a ainsi reculé, aujourd’hui elle s’en félicite ! mais la religion s’est perdue et avec elle, la force de la charité fraternelle ; notre nation française a perdu sa vitalité. En 1940, notre désastre sanctionnait une criante impréparation politique et militaire, certes. Mais plus profondément, « l’esprit de jouissance l’ayant emporté sur l’esprit de sacrifice », le peuple de France n’était pas prêt aux sacrifices que les poilus de la Grande Guerre avaient été capables de consentir vingt ans auparavant. Et survint l’abandon de la terre, la trahison de la Communauté d’Algérie, les Français de métropole préférant donner leur “ Oui ” au référendum sur l’autodétermination pour ne pas avoir à défendre leurs frères qui se faisaient égorger là-bas.

 Non ” ! Suivant de Gaulle, ils préférèrent se tourner vers l’Europe des affaires et s’adonner à cette économie libérale qui assura au pays une envahissante réussite matérielle. Tous en profitèrent, certes, mais ce matérialisme acheva de priver la France de sa religion catholique, source de son héroïsme militaire, du sens civique, de la fraternité nationale, cet esprit de communauté... autant de forces et de vertus perdues pour faire face au problème religieux que pose aujourd’hui l’islam et qui met en échec la République divisée... contre elle-même.

Quel est le problème posé aujourd’hui par cette religion ?

Il règne dans les esprits une telle confusion qu’il est impossible de répondre à cette question sans disposer des trois clefs que voici.

La première est que tous les sujets liés à l’immigration, à la sécurité, à la religion sont des tremplins électoraux fantastiques. Notre Père n’a eu de cesse de nous le rappeler avec beaucoup, beaucoup d’insistance. C’est parce que bon nombre de ses lecteurs et amis ne voulurent pas le comprendre que notre Père dut se résoudre à dissoudre la Phalange en 1988. Chaque responsable politique, chaque élu censé comprendre ces questions et leur apporter une solution sait qu’en prenant publiquement position sur de tels sujets, dans un sens ou dans un autre, il excite et exacerbe la passion démocratique des Français, quand il n’est pas lui même l’otage de ses propres passions ou idéologies. D’ailleurs, ce phénomène est démultiplié à l’envi par les médias et les groupes de pression en tous genres dont les mêmes élus et responsables politiques sont dans tous les cas les esclaves. Donc tout ce qu’on peut entendre ou lire sur ces sujets est, de toute façon, toujours biaisé.

Deuxième clef : nos institutions “ démocratiques ”, au nom du principe de laïcité, se font fort d’intervenir dans les domaines religieux qu’elles veulent contrôler et dominer, tout en prétendant ignorer ostensiblement le contenu, la valeur et la vérité des doctrines religieuses... Mais comment traiter sérieusement d’une question en se limitant à la forme, au secondaire, sans s’intéresser au fond, au principal ? C’est contradictoire et cela relève d’une véritable aliénation mentale. Le Tribunal correctionnel de Besançon vient de condamner quatre Bosniaques, musulmans, pour avoir battu et tondu leur fille et nièce qui voulait se marier avec un jeune Serbe, chrétien. Commentaire du Figaro dans son édition du 24 octobre : « Entre tradition moyenâgeuse et violences intrafamiliales, il n’y a qu’un point qui aura été ignoré vendredi : le motif religieux de la colère des parents pourtant affirmé par Selma [la victime]. “ La question n’est pas la religion  a tranché la présidente du Tribunal,  mais de savoir comment Selma a été tondue et par qui ”. » Sans commentaire !

Troisième clef : cette “ neutralité ” tellement con­tradictoire et équivoque cache mal un parti pris résolu de considérer que le Bon Dieu, Notre-Seigneur Jésus-Christ, n’existent pas, avec toutes les conséquences politiques, économiques, sociales, scientifiques, philosophiques, cultuelles, culturelles et autres, qu’implique une telle profession d’irréligion. De surcroît, cette neutralité est toujours insidieusement pratiquée à l’avantage de l’islam ; cette religion représente non seulement un réservoir électoral qu’il serait dommage de négliger, mais surtout un allié de choix pour l’instauration en France d’une société multiculturelle et non plus chrétienne, voire une machine de guerre contre l’Église. Car la religion catholique, le nationalisme catholique sous toutes leurs formes étaient, sont et seront toujours les seuls vrais adversaires déclarés de la République, qui se prive ainsi délibérément des lumières supérieures de la foi sur l’ensemble des activités humaines qu’elle est censée organiser.

Le 8 septembre 2020, fête de la Nativité de la Vierge Marie, rompant avec une tradition à laquelle se soumettaient la plupart de ses prédécesseurs, le nouveau maire écologiste de Lyon, Grégory Doucet, refusa de se rendre à la basilique de Fourvière pour prendre part à la cérémonie de renouvellement du Vœu des Échevins prononcé le 12 mars 1643 afin de conjurer une épidémie de peste. Motif allégué : le principe de la laïcité... qui ne l’empêcha pas, dès le lendemain, de courir poser, à Gerland, la première pierre d’une nouvelle mosquée, l’ancienne capitale des Gaules comptant déjà quinze mosquées et lieux de prières musulmans !

Le 12 janvier 2015, au lendemain des attentats de Charlie Hebdo, et l’Hyper Cacher commis au nom de l’islam, Christiane Taubira, garde des Sceaux, volait au secours de cette religion, qui pourtant venait de terroriser toute la France, en enjoignant à l’ensemble des parquets de « combattre avec la plus grande vigueur les propos ou agissements répréhensibles, haineux ou méprisants, proférés ou commis en raison de l’appartenance à une religion ». Et si Emmanuel Macron a annoncé pour la rentrée prochaine la fin de la scolarisation à la maison des enfants afin de lutter contre le “ séparatisme islamiste ”, que les paisibles familles catholiques qui veulent protéger leurs enfants de l’intrusion de l’Éducation nationale ne relèvent pas trop vite la tête : cette interdiction générale et arbitraire les concerne tout autant. Et si elles s’aventuraient à la braver, l’étiquette “ dérive sectaire ” sera aussitôt collée à leur réputation.

Tout cela étant dit, nous sommes maintenant libres de présenter en toute vérité le problème soulevé aujourd’hui en France par l’islam.

Comme nous l’avons étudié scientifiquement et démontré, l’islam, dans l’essence même de sa doctrine, est à l’origine une religion de conquête et l’est restée jusqu’aujourd’hui. Elle considère jusqu’au fanatisme que le “ Mahomet ” de la légende est le prophète « du Dieu », traduction exacte du nom d’Allah, que le Coran est un Livre révélé, rendant manifeste la fausseté des autres religions qu’il faut anéantir pour le bien de l’humanité, par obéissance « au Dieu ». Et en toute logique religieuse, cette religion considère que toutes les activités humaines, qu’elles soient familiales, matérielles, politiques, économiques et autres doivent être dominées par la volonté de son Dieu. Intégriste, totalitaire, fanatique, il n’y a pas d’entente possible avec cette religion et paradoxalement c’est précisément cela qui lui donne toute sa force. Aussi la distinction entre “ islam modéré ” et “ islam radical ” n’existe que dans l’esprit de chrétiens apostats, épris de confort, d’hygiène, et de “ sécurité ”, qui ne connaissent pas le Coran et qui, en définitive, préfèrent demeurer dans l’illusion, dans ce faux esprit de tolérance que leur donne l’idéologie des droits de l’homme et de la dignité transcendante de la personne humaine.

« L’important, écrit notre Père, n’est pas la dignité de la personne et la reconnaissance de ses droits individuels, concepts d’Occidentaux décadents. L’important, c’est l’islam, la communauté qui subsiste et se sent forte, capable de lutter, de dominer, de vaincre et avancer encore. La “ guerre sainte ” est donc l’impératif vital de l’islam, conçue comme le combat pour la fraternité musulmane plus que pour le règne de Dieu. » (CRC n° 150, février 1980) C’est pourquoi le pape François a pu signer avec l’imam d’El-Ahzar une déclaration commune sur le thème de la “ ­Fraternité ” qui lui est cher... Fratelli tutti !

En revanche, si une distinction peut être faite, c’est bien entre islam et musulmans et entre musulmans eux-mêmes. Très divisés et avec de grandes disparités entre eux, beaucoup sont loin de pratiquer de façon fanatique leur religion et ne demandent qu’une chose : vivre en paix. C’est évident.

Et il est tout aussi évident que nombre d’entre eux sont sous l’emprise d’un embrigadement djihadiste ou proche de le devenir et représentent donc un vrai danger pour l’ordre et la paix dans notre pays. Ceux-là, par tous les moyens, telles des bêtes sauvages, doivent être pourchassés et définitivement “ neutralisés ”. C’est une question de vie ou de mort.

Mais entre ces deux situations extrêmes, bon nombre de musulmans en fait, en droit, s’imposent en tant que tels dans un esprit de conquête plus ou moins marqué sur la société française. C’est la création de mosquées et de lieux de prières, le port ostensible de vêtements à caractère islamique tels le voile, le burkini, le respect de régimes alimentaires, la création d’écoles coraniques, l’enseignement de langues et de cultures d’origine, etc. Et voilà que les institutions de la République réagissent en ordre dispersé, les unes pour s’opposer à ces atteintes ­répétées au “ principe ” de laïcité, les autres au contraire pour accepter ces avancées musulmanes dans notre paysage français au nom du droit d’asile, de la liberté de conscience, de la liberté religieuse, de la liberté d’opinion et d’expression, du droit à la différence... bref au nom des droits de l’homme.

C’est ce que remarque Valeurs Actuelles dans son numéro de février-mars de cette année : « au-­dessous de ces références suprêmes au droit français, il y a l’école, l’université et toute une galaxie d’associations, d’organisations, d’observatoires, de comités, de hauts conseils tels le Conseil supérieur de l’audiovisuel, la Caisse nationale d’allocations familiales, le Planning familial, la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme, la Ligue des droits de l’homme, le Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples, etc. Tout un écosystème a œuvré, année après année, à attaquer sans répit le corps national pour y installer de plus en plus profondément, durablement, irrémédiablement, l’écharde islamiste. »

Et que propose Emmanuel Macron qui a décidé de partir en guerre contre ce qu’il appelle le “ communautarisme islamiste ”, “ l’islamisme politique ” ? La “ reconquête républicaine ”... la laïcité... Mais « quand va-t-on comprendre que l’islam propose un universalisme plus complet et plus puissant que le nôtre ? commente avec à propos Valeurs Actuelles. Les musulmans s’en moquent de la République. En vérité, c’est la France qu’il faudrait proposer. Cette France détricotée, décomposée, éviscérée, et dont il reste aujourd’hui si peu de chose. »

Cette réflexion de bon sens permet d’introduire trois conclusions.

Premièrement, proposer la France aux musulmans, oh certes oui ! mais libérée de la République. Voilà la condition sans laquelle il n’y a pas de solution. La République, à l’exception de son irréligion et de son matérialisme individualiste que méprisent profondément les musulmans, même s’ils savent en tirer parti, n’a rien, absolument rien à leur opposer pour nourrir leur cœur et leur esprit. Et une République, sur ordre d’Emmanuel Macron qui va désormais généraliser la diffusion de caricatures publiées dans Charlie Hebdo au nom d’une folle “ liberté sacrée de toute opinion ”, est un véritable appel à la guerre civile et religieuse qui relève d’une irresponsabilité criminelle.

Car “ l’État de droit ” c’est-à-dire le respect de la hiérarchie des normes, et donc, au dernier degré, le respect des droits fondamentaux de l’individu jusqu’au détriment du bien de la communauté nationale, n’est rien d’autre qu’un aveu d’impuissance des institutions républicaines face à l’esprit conquérant de l’islam. « Les islamistes profitent plus largement d’un climat de nos sociétés qui se résume dans le mot de faiblesse et dont les failles, en particulier juridiques, des démocraties libérales ne sont qu’une expression parmi d’autres », écrit le Figaro dans son édition du 26 octobre. Mais non ! c’est bien la République tout entière qui est, par définition, par essence, défaillante, et il faut s’en défaire pour s’attaquer à la racine du mal, pour qu’un pouvoir de nature dictatoriale, voire royale, sacrale ! puisse en toutes circonstances assurer l’ordre et la paix de la nation, et donner ainsi réellement à nos institutions politiques une supériorité et une force qui soient reconnues et respectées par les populations musulmanes en France.

Deuxièmement, renverser la République rendrait à l’Église sa mission civilisatrice pour restaurer et affermir les mille et mille liens entre les communautés humaines, la plus achevée étant la nation, en les irriguant de la charité surnaturelle qui en est la seule source. C’est par la supériorité de notre civilisation chrétienne que nous gagnerons le cœur des musulmans pour d’abord agréger leurs communautés à notre communauté nationale française, et ensuite les convertir à notre sainte religion. En attendant, la République refuse de s’entendre avec l’Église pour lutter contre la montée en puissance de l’islam. La trahison est patente. Et les gens prêts à en découdre avec la religion du Coran ne s’en rendent pas compte !

D’où l’importance, pour nous phalangistes, de connaître notre doctrine des 150 Points que nous a laissée notre Père afin de “ maintenir ” ; car, troisièmement, en l’état actuel des choses, je ne puis faire mieux que de répéter les derniers mots que prononça notre Père à l’issue d’une conférence, le 17 avril 1986, et qui sont plus que jamais d’actualité : « L’islam devient la vérité obligatoire, sous peine de quoi il y a toujours la menace. Et l’islam avance à cause de cette menace. Je pense que si nous ne changeons pas, que si nous ne revenons pas à une vraie religion catholique du Syllabus, avec une société royale, une société autoritaire d’un Roi Très-Chrétien, d’un dictateur catholique, nous nous ferons manger l’un après l’autre, par la terreur puis par la séduction des masses. Notre pays deviendra un pays musulman ! »

En attendant, la France fait l’unanimité du monde musulman contre elle, du fait de ce prétendu droit à la caricature, au blasphème, défendu par Emmanuel Macron qui, comme Daladier en 1939, nous jette dans la guerre sans aucune préparation.

À Dacca, au Bangladesh, plusieurs milliers de manifestants se sont retrouvés mardi aux alentours de l’ambassade de France à l’appel de l’Islam Andolan Bangladesh (IAB), l’un des principaux partis islamistes bangladais. « Nous, les musulmans, nous n’avons jamais caricaturé les autres religions », a lancé Rezaul Karim, l’un des leaders de l’IAB. « J’appelle tous les musulmans du monde à boycotter les produits français. Nous leur donnerons une leçon », a-t-il promis. Dans la foule, un portrait d’Emmanuel Macron accusé « d’adorer Satan » a été brûlé. En Syrie, dans la bande de Gaza ou en Libye, des portraits du président français ont également été brûlés. Au Pakistan, notre ambassadeur a été convoqué. L’Iran attise aussi la colère dans la rue tandis que dans d’autres pays le ton est plus modéré, mais il a bien fallu y aller de son petit couplet pour condamner les caricatures de Charli Hebdo, tels le Maroc ou la Jordanie.

Le plus inquiétant fut un communiqué de l’agence THABAT, proche de l’organisation Al-Quaïda, publié le 25 octobre, engageant à commettre à l’arme blanche des actions individuelles au titre du djihad, en visant notamment les églises et les symboles de la Chrétienté. La menace fut prise très au sérieux par le ministère de l’Intérieur. Et vendredi 30 octobre, trois fidèles catholiques innocents subirent de la part d’un migrant tunisien ayant transité par l’île de Lampedusa si chère au cœur du pape François, au cri d’ « Allah Akbar », le rituel islamique de l’égorgement dans la basilique Notre-Dame de l’Assomption à Nice. Le même jour, les services de police purent de justesse éviter à Lyon et à Avignon des drames comparables.

Mais, comme on pouvait s’y attendre, c’est la Turquie qui tire le “ meilleur parti ” de cette affaire, ce pays gouverné par Recep Tayyip Erdogan depuis 2003 en tant que Premier ministre puis chef d’État, lui-même très proche des Frères musulmans. La Turquie laïque de Mustafa Kemal Atatürk a, depuis son fondateur, singulièrement changé de visage.

« Ce n’est plus ce pays rudimentaire à l’identité incertaine aux marges de l’Europe, écrit Tancrède Josseran dans le numéro d’octobre-novembre 2020 du Figaro Histoire. Avec 83 millions d’habitants, elle dépasse l’Allemagne. Seizième puissance économique de la planète, elle s’affirme. Elle ne quémande pas une place d’Occidentale d’honneur, elle veut être reconnue pour ce qu’elle est, c’est-à-dire une puissance renaissante. Tel est le sens de la transformation en mosquée de Sainte-Sophie, ainsi que celle de Saint-Sauveur-in-Chora, l’une des plus belles églises d’Istanbul, annoncée par Erdogan le 21 août. »

Ce mouvement d’islamisation de la part de la Turquie concerne aussi bien son propre territoire que le nôtre. Le rapport 2018 de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) met bien en évidence la volonté de la Turquie d’instrumentaliser l’islam dans sa vision géostratégique au travers notamment de ses émigrés installés dans les différents pays européens dont la France, en concurrence du Qatar, de l’Arabie saoudite, et des pays du Maghreb. Ce rapport recense deux structures très actives sur notre territoire. D’abord le DITIB, une émanation du Ministère des Affaires étrangères dont l’objet est l’islamisation des diasporas turques, en les fédérant, en leur enseignant les préceptes du Coran, au travers d’organisations culturelles et cultuelles, en organisant le pèlerinage à La Mecque, etc. Le DITIB gère plus de la moitié des mosquées et salles de prières turques en Europe et contrôle en France près de la moitié des imans envoyés et salariés dans notre pays par des pays étrangers.

Autre structure, le Milis Görüs, proche des Frères musulmans. Son rôle essentiel tient dans la construction de mosquées. La DGSI note dans son rapport : « Mouvement particulièrement dominant dans l’influence de l’islam turc en France et en Europe. Il porte des valeurs telles que l’anti-occidentalisme, l’anti-maçonnisme et le refus de la laïcité, notamment par la volonté de faire porter le voile aux femmes, même au sein des établissements scolaires. Son logo est très explicite de ce point de vue : il représente une Europe entourée d’un croissant islamique. »

Tancrède Josseran poursuit : « À travers l’islam, la Turquie renoue avec l’universel et sa vocation mondiale, et ce constat balaye les clivages politiques. Kémalistes, islamo-conservateurs, nationalistes sont unanimes : la planète s’achemine vers un ordre post-occidental et la Turquie doit y trouver sa place. En conséquence, les cadres juridiques posés au lendemain de la Première Guerre mondiale sont jugés dépassés. Si le traité de Lausanne a reconnu l’indépendance de la Turquie, c’est, de l’aveu d’Erdogan, une Turquie réduite à la portion congrue :  Quelqu’un [il désigne sans le nommer Mustapha Kemal] a essayé de nous faire avaler Lausanne comme une victoire. Ce n’est pas évident. Regardez la mer Égée en ce moment. Nous avons donné les îles à Lausanne. Est-ce là une victoire ? ” »

D’où le conflit au sujet des îles de la mer Égée qui représentent pour la Grèce sa première et dernière ligne de défense et pour la Turquie le risque de se voir acculée à l’extrémité orientale de la Méditerranée, par application de la convention de Montego Bay qui autorise depuis 1982 tout pays à élargir ses eaux territoriales à 12 milles nautiques (soit 22 km). C’est cette même convention, dont la Turquie n’est pas signataire, qui a créé et octroyé à tout État côtier les zones économiques exclusives (les ZEE) qui sont au cœur des tensions actuelles en Méditerranée orientale. « En empiétant sur la zone exclusive de la Grèce, le protocole d’accord que la Turquie a signé unilatéralement avec la Libye en novembre 2019 défend une vision arbitraire de sa propre zone exclusive. Celle-ci implique la confrontation avec Athènes et Nicosie, qui revendiquent les mêmes eaux. » (ibid.) Et l’enjeu, en définitive, n’est autre que la maîtrise des routes maritimes, des richesses qui y transitent et le droit d’exploiter les richesses énergétiques que la Méditerranée orientale abrite. N’insistons pas, nous avons déjà évoqué cet enjeu géostratégique dans lequel la France a un rôle à jouer. (cf. Il est ressuscité n° 214, octobre 2020, p. 7).

En Syrie, avec laquelle elle partage plus de 800 kilomètres de frontière, c’est la guerre qui a bouleversé l’agenda de la Turquie : après avoir misé, en vain, sur la chute de Bachar el-Assad, Ankara a progressivement réorienté sa politique vers une campagne militaire concentrée sur les milices kurdes d’Irak et du Nord syrien, accusées de collusion avec la guérilla du PKK. Cette offensive s’est accélérée après le coup d’État avorté de 2016 : en l’espace de quatre ans, l’armée turque a mené trois incursions militaires en Syrie, appuyée par des supplétifs syriens. « Aujourd’hui, on assiste à une politique beaucoup moins idéaliste fondée sur la défense des intérêts stratégiques de la Turquie, qui s’avère beaucoup plus offensive sur le plan régional », remarque Jean Marcou, spécialiste de la Turquie contemporaine.

Au printemps 2020, l’intervention en Libye prend un nouveau cap. En volant militairement au secours du chef du gouvernement d’union nationale de Tripoli, Fayez al-Sarraj, contre le général Haftar, la Turquie s’est montrée capable de s’affirmer militairement au-delà de simples opérations transfrontalières.

Bref, la Turquie est partout. Quant à l’objectif ultime, Erdogan ne le cache pas : « Cent ans après, il faudra rétablir le califat », a-t-il déclaré.

« Ce rétablissement du califat, écrit Alexandre del Valle spécialiste en géopolitique et auteur d’un livre sur les Frères musulmans, se fera selon moi de façon progressive, à travers des institutions souples, un leadership turc néo-ottoman, des pressions diplomatiques et des projets de solidarités panislamiques politiques, socio-culturels, religieux-théologiques, éducatifs et même économiques et stratégiques (implantations d’entreprises et de bases militaires turques en pleine expansion dans le Golfe et en Afrique, etc.). »

Ainsi que dans le Caucase du Sud, en proie à un conflit de grande intensité opposant deux anciennes républiques soviétiques ?

La région montagneuse du Haut-Karabakh, au sud des monts du Caucase, au nord-ouest de l’Iran, au nord-est de la Turquie, appartiendrait à l’Azerbaïdjan selon le droit international. Mais dans les faits, cette enclave en plein territoire azéri est arménienne par son histoire, sa culture, son peuplement et surtout sa religion. Terre de Chrétienté très ancienne, dépendant majoritairement de l’Église apostolique arménienne, schismatique depuis le cinquième siècle. Par sa situation géographique, le plateau du Haut-Karabakh a subi, comme la région d’Erevan, les invasions assyriennes, scythes, mèdes, babyloniennes, parthes, perses, romaines, arabes, turques, mongoles, russes... C’est dans cette opposition parfois héroïque à ces envahisseurs, que s’est forgée l’identité arménienne. Pour les Arméniens, le Haut-Karabakh, souvent premier rempart face aux ennemis venant d’Asie, terre sacrée s’il en est, est l’équivalent du Kosovo pour les Serbes.

Arrachée à la domination perse par les Russes au dix-neuvième siècle, Staline, certainement dans un esprit de division du peuple arménien, rattacha cette terre chrétienne à la République soviétique ­d’Azerbaïdjan, peuplée, elle, majoritairement par des turcophones chiites. Il prépara ainsi les conditions d’une guerre inéluctable qui se déclencha dès les premiers signes de relâchement de l’étau soviétique, en 1988, à la faveur de la Perestroïka. Le Haut-Karabakh se souleva alors contre Bakou pour rejoindre le giron d’Erevan. Et ce conflit s’accentua avec la dissolution de l’Union soviétique à la fin de l’année 1991.

Malgré la création en 1992, dans le cadre de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), du groupe de Minsk co-présidé par la France, la Russie et les États-Unis, et chargé de parvenir à une résolution pacifique et négociée du conflit, les combats firent près de 30 000 morts. Ils s’achevèrent en 1994 par une fragile victoire militaire du Haut-Karabakh qui s’autoproclama alors république indépendante, mais sans reconnaissance internationale de quiconque. Victoire militaire d’autant plus fragile que le Haut-Karabakh a acquis sur la partie adverse toute une couronne territoriale. Depuis l’année 1994, la récupération de ses territoires perdus tout comme le recouvrement de sa souveraineté sur le plateau du Haut-Karabakh est une cause nationale pour l’Azerbaïdjan. D’où des conflits sporadiques sans fin.

Le 27 septembre dernier, l’armée de Bakou lança une offensive surprise pour récupérer ces territoires perdus. Mais avec cette circonstance particulière du soutien militaire, en conseillers et en armement, de la part de la Turquie, laquelle n’a pas hésité à faire déployer des mercenaires djihadistes en provenance de Syrie. C’est vraiment jeter de l’huile sur le feu, les Arméniens n’ayant pas oublié les massacres de masse dont ils furent victimes, notamment en 1895 et en 1915, et que la Turquie n’a jamais voulu reconnaître.

Conflit très délicat, les deux belligérants étant bien décidés à aller jusqu’au bout, en particulier l’Arménie qui semble actuellement en difficulté sur le plan militaire. Nikol Pachinian, son Premier ministre, a demandé à tous « les dirigeants des villes, des districts, des villages, des partis politiques, des organisations civiles, des cercles des affaires, d’organiser des unités de volontaires » pour combattre au côté des séparatistes du Haut-Karabakh. À ce jour, il semble que s’ouvre pour l’Azerbaïdjan, qui jouit d’une supériorité militaire reconnue, la perspective de reconquérir le corridor de Latchine et ainsi de couper la province du Haut-Karabakh de la République d’Arménie.

Conflit délicat également pour la Russie qui, même aux côtés de la France et des États-Unis avec lesquels elle préside le groupe de Minsk, demeure sans doute la médiatrice la plus autorisée pour éteindre, aux portes de ses frontières, ce foyer né pour une large part d’un tracé arbitraire des frontières datant de la période soviétique. Mais eu égard aux bonnes relations entretenues avec les deux belligérants, elle n’entend prendre parti ni pour l’un ni pour l’autre et encore moins entreprendre une intervention militaire, même dans le cadre de l’Organisation du Traité sur la Sécurité Collective (OTSC), du moins tant que l’Azerbaïdjan n’étendra pas ses opérations militaires sur le territoire de l’État arménien, ce qu’il se gardera bien de faire.

Dans l’immédiat, la Russie tente un rapprochement des parties sur la base du plan élaboré par Sergueï Lavrov : restitution à l’Azerbaïdjan de cinq districts puis de ceux de Latchine et Kelbadjar et gel du conflit sur le Haut-Karabakh lui-même le temps de négocier un statut pour la province et le retour des Azéris déplacés... Déception pour l’Arménie, qui espérait que Moscou interdise la remise en cause de l’occupation du corridor de Latchine. Les accords de cessez-le-feu, jusqu’à présent négociés avec peine, n’ont jamais été respectés et les combats auraient fait de part et d’autre deux mille victimes selon Vladimir Poutine.

Mais la situation est rendue d’autant plus complexe par la présence de la Turquie au milieu de ce conflit. L’abondance des réserves pétrolières et gazières de l’Azerbaïdjan joue sans doute son rôle, Ankara souhaitant devenir un acteur dans le domaine énergétique. Mais cet engagement de la Turquie aux côtés de l’Azerbaïdjan est aussi politique et religieux, Ankara cherchant à étendre sa zone d’influence dans cette région du Caucase du sud ; et avec elle c’est l’islam conquérant qui fait son chemin...

... profitant de notre faiblesse. Faiblesse de notre laïcisme et de nos institutions en France qui abrite en son sein la plus importante population musulmane d’Europe et qui demeure à leurs yeux, malgré notre reniement, une nation chrétienne. Faiblesse du schisme du côté de la Russie qui certes, grâce à Vladimir Poutine, a su briser le califat musulman qui se formait par la violence à l’intérieur même de ses frontières dans tout le Caucase du Nord avec comme tête de pont la Tchétchénie, mais qui néanmoins demeure paralysée dans son élan missionnaire pour s’occuper de toutes ces populations musulmanes dont elle a directement ou indirectement la charge... et les convertir. Et le lien entre la France, la Russie et même tous ces musulmans qui la respectent : c’est la Sainte Vierge. C’est notre seul recours. C’est une volonté de Dieu, de plus en plus compréhensible, que l’on se tourne vers son Cœur Immaculé et que la Russie lui soit consacrée à la parole du Saint-Père. Il faut donc beaucoup prier pour le Saint-Père !

frère Bruno de Jésus-Marie.