Il est ressuscité !

N° 238 – Décembre 2022

Rédaction : Frère Bruno Bonnet-Eymard


« Récitez le chapelet tous les jours. »

Les mystères joyeux du Rosaire (II)

LA NATIVITÉ

Troisième mystère joyeux, la Nativité : « Joseph monta de Galilée, de la ville de Nazareth, en Judée, à la ville de David, qui s’appelle Bethléem, parce qu’il était de la maison et de la lignée de David afin de se faire recenser avec Marie, sa fiancée, qui était enceinte. » (Lc 2, 4-5)

« C’était une Mère, une jeune Mère portant en son sein son Fils premier-né, Fils de Dieu, entendant battre sous son cœur le Cœur de son enfant [...]. À quel point elle a dû être touchée et encore enflammée d’amour par ce contact de son Cœur avec le Cœur de son petit ! Quel abîme d’amour maternel dans le Cœur virginal de Marie ! » (Retraite sur La vie intérieure, septembre 1964)

 

Notre Père nous faisait contempler les mystères de ce Cœur Immaculé dans cette dernière journée qui précéda la naissance de notre Sauveur.

« Ce qui m’a frappé disait-il, c’est cette solitude immense, cette solitude inouïe, surhumaine de la Vierge Marie dans ce mystère. Le monde entier ne sait pas qu’aujourd’hui se réalisent les grands desseins de Dieu, les grandes promesses messianiques, l’attente des peuples, l’attente lucide du peuple d’Israël, les prophéties d’Isaïe, d’Ézéchiel, de Jérémie, de Daniel, d’Osée, d’Amos, de Joël et des autres ; mais elle, elle le sait. Toutes les promesses répétées de siècle en siècle depuis mille ans, s’accomplissent.

« Elle passe au milieu d’une foule qui se rend à Bethléem pour s’inscrire dans ce comput de la population de l’Empire romain, toute cette foule en déplacement, et elle sait qu’elle porte en elle le Sauveur du monde. Saint Joseph aussi le sait, mais je dirai que son humilité et sa discrétion vis-à-vis de la Vierge Marie ne font que souligner la solitude de la Vierge. Elle est tellement au-dessus de lui par la sagesse, par la grâce, elle est tellement absorbée dans son secret, dans sa contemplation que lui-même n’oserait pas troubler, que vraiment cette enfant, cette si jeune enfant, cette Vierge Immaculée est seule, comme à mi-distance entre la terre et le Ciel, entre cette terre de péchés et ce Ciel avec lequel elle est en communication si intime.

« Elle savait bien que celui qui bougeait, qui descendait lentement dans son sein pour bientôt paraître à la lumière, celui-là était le Fils de Dieu et que Dieu avait les yeux tournés vers ce Bethléem où il allait naître. Elle savait bien aussi que seule sur la route et bientôt seule dans les ténèbres de cette grotte, elle était entourée de tous les anges, de tous les saints patriarches, de tous les saints du paradis, qui faisaient leur cour déjà à cet Enfant avant qu’il ne naisse !

« Il n’empêche qu’elle était inquiète car elle, elle n’avait personne, elle était sur les chemins, ils allaient frapper de maison en maison, à une porte demeurant partout fermée, et elle se demandait comment tout cela allait se passer ! Son Cœur de Mère n’a pas pu ne pas s’inquiéter de cette condition misérable dans laquelle allait naître Celui dont elle savait qu’il était le Fils de David, le Roi d’Israël, le Roi des rois et Seigneur des seigneurs, le Fils de Dieu fait homme. Alors, comme son Cœur de jeune maman devait être ému, devait être inquiet ! » (Sermon, 25 décembre 1983)

« Or il advint, comme ils étaient là, que les jours furent accomplis où elle devait enfanter. » (Lc 2, 6)

Jésus dirigeait tout, et ses parents commençaient à s’instruire de ses leçons. Il voulait donc naître pauvre, dans l’obscurité, dans la nuit, mais à Bethléem selon les prophéties !

La Vierge Marie ressentait par spasmes de plus en plus rapprochés, non les douleurs annonciatrices, mais des joies, des joies sublimes qui de ses entrailles rayonnaient jusqu’en son âme et qui l’attiraient vers la solitude pour mettre au monde Jésus, toute seule, comme elle l’avait conçu, dans l’adoration.

Ainsi Marie « enfanta son fils premier-né, l’enveloppa de langes et le coucha dans une crèche, parce qu’ils manquaient de place dans la salle » (Lc 2, 7).

« Après un temps assez long d’extase, Marie appela doucement son époux et mit sur ses genoux, selon l’usage ancestral, sur ses genoux de père légitime, l’Enfant qu’elle lui donnait [...]. Un grand moment, Jésus ne fut qu’à eux, “ merces magna nimis ”, trop excessive récompense, tandis que la cour céleste descendait l’adorer, et vénérer pour la première fois ses parents de la terre. » (Lettre à mes amis n° 104, 19 mars 1962)

« La Vierge Marie est donc au sommet de l’allégresse, dans une sorte de vertige, d’extase perpétuelle : elle contemple, formé de sa propre chair, de son propre sang, le Visage de cet Enfant dont elle sait qu’il a déjà une conscience non pas d’homme, mais de Dieu. Elle plonge ses yeux dans les siens !

« Au Ciel, quand Jésus regarde son Père céleste, Il voit bien que tout son être dépend du Père céleste, qu’Il tire tout son être du Père céleste. Il est à égalité avec Lui et Il est dans l’adoration de son Père. Si quelqu’un adore comme il faut quelqu’un, c’est le Fils quand Il adore son Père.

« Ensuite, en cette nuit de Noël, quand Il s’est tourné vers sa Mère pour la première fois, Il la regarde, et la met-Il au-dessous de Lui ? Il ne peut la mettre qu’au-dessus. Quand il dit : “ C’est ma Mère ”, Jésus, le Fils de Dieu, voit au-dessus de Lui, Il ne voit qu’une seule et même personne qui envahit tout son Ciel. Quand Il regarde son Père, au-dessus de Lui, Il voit sa Mère dans son Père. Cela produit une sorte d’intégration, d’entrée de la Vierge Marie dans le mystère de la Sainte Trinité, tellement que la Vierge Marie, ayant enfanté elle-même le Fils de Dieu, le Fils de Dieu reçoit ce don de la Vierge Marie comme de son Père. Il la voit toute unie au Père dans cette œuvre de l’Incarnation, à laquelle il doit sa vie terrestre vouée au rachat de l’humanité. Cela fait que la Vierge Marie se trouve très, très bien dans cette consubstantialité des Personnes divines, d’une certaine manière. Il n’y a que trois Personnes divines, mais il y a une personne plus divine qu’humaine, une femme créée par Dieu et qui est introduite dans le mystère de la Sainte Trinité au point d’en être toute divinisée, de mériter sous ce mode-là notre adoration. » (23 octobre 1993)

Nous comprenons donc que ceux qui ne croient pas à la Maternité Divine de la Sainte Vierge font un horrible outrage à l’Enfant-Jésus et donc au Cœur Immaculé de Marie !

« Le Cœur de saint Joseph quant à lui, brûlait d’amour pour la Vierge et le trésor qu’elle portait en elle. Il pouvait bien neiger ! Il était au comble de la joie quand il a couché l’Enfant dans la crèche [...]. Jésus regardait la Vierge Marie avec ses yeux tout neufs de Dieu fait homme avec une immense joie, un immense amour, car il était venu pour cela, pour être embrassé des hommes et les embrasser. Jésus commençait donc ses audiences. Et il commençait par la Vierge Marie, puis saint Joseph, puis les bergers, image des millions et des millions d’hommes. Il leur a tendu ses petits bras, comme plus tard, il les tendra sur la Croix pour nous appeler à lui : c’est le même amour, c’est la même joie, c’est la même victoire sur l’ennemi. Jésus était donc heureux. » (Sermon, 25 décembre 1980)

Or, « il y avait dans la même région des bergers qui vivaient aux champs et gardaient leurs troupeaux durant les veilles de la nuit. L’Ange du Seigneur se tint près d’eux et la gloire du Seigneur les enveloppa de sa clarté ; et ils furent saisis d’une grande crainte. Mais l’ange leur dit : Soyez sans crainte, car voici que je vous annonce une grande joie, qui sera celle de tout le peuple : aujourd’hui vous est né un Sauveur, qui est le Christ Seigneur, dans la ville de David. Et ceci vous servira de signe : vous trouverez un nouveau-né enveloppé de langes et couché dans une crèche. ” » (Lc 2, 8-12)

C’est d’une simplicité incroyable. Moi, je suis ému, disait notre Père, parce qu’il y a trois minutes, c’est sa Maman toute seule qui l’a enveloppé de langes et couché dans une crèche. Ce sont les deux mouvements opérés par la Sainte Vierge que les anges ont vus, ont reçus en mémoire pour que ce soit le signe. Et cela veut dire : quel enfant merveilleux, allez voir plutôt sa Mère, vous regarderez sa Maman. C’est Elle qui l’a enveloppé de langes et couché dans une crèche. Donc le Signe, c’est Elle ! comme l’avait annoncé le prophète Isaïe au roi Achaz, sept cents ans auparavant : « Voici qu’une Vierge concevra et enfantera un Fils, et Elle lui donnera le Nom d’Emmanuel. » (Is 7, 14) (Sermon, 25 décembre 1997)

« Et soudain se joignit à l’ange une troupe nombreuse de l’armée céleste, qui louait Dieu, en disant :

« Gloire à Dieu au plus haut des cieux et sur la terre paix aux hommes objets de sa complaisance ! »

« Et il advint, quand les anges les eurent quittés pour le ciel, que les bergers se dirent entre eux : Allons jusqu’à Bethléem et voyons ce qui est arrivé et que le Seigneur nous a fait connaître.  Ils vinrent donc en hâte et trouvèrent Marie, Joseph et le nouveau-né couché dans la crèche. Ayant vu, ils firent connaître ce qui leur avait été dit de cet enfant ; et tous ceux qui les entendirent furent étonnés de ce que leur disaient les bergers. Quant à Marie, elle conservait avec soin toutes ces choses, les méditant en son Cœur. Puis les bergers s’en retournèrent, glorifiant et louant Dieu pour tout ce qu’ils avaient entendu et vu, suivant ce qui leur avait été annoncé. » (Lc 2, 13-20)

La récitation du chapelet n’est que la continuation de cette louange et glorification de ce que les bergers ont entendu des anges et vu, à l’unisson du Cœur Immaculé de Marie conservant avec soin toutes ces choses et les méditant avec amour.

PRÉSENTATION DE JÉSUS AU TEMPLE

Quatrième mystère joyeux, la Présentation de l’Enfant-Jésus au Temple de Jérusalem.

Huit jours après la Nativité, la Vierge Marie et saint Joseph montent de Bethléem à Jérusalem pour la circoncision de l’Enfant-Jésus ainsi que « pour le présenter au Seigneur » (Lc 2, 22) dans le Temple.

Ils n’ont pas eu à attendre le « trente-troisième jour » prévu par la loi de Moïse, à compter de la circoncision de l’enfant, pour la « purification » d’une mère relevant de ses couches. Parler de « purification de la Sainte Vierge » pour cet événement ne convient vraiment pas ! Rien ne justifiait un tel rite pour l’Immaculée, demeurée vierge avant, pendant et après le Divin Enfantement. Parce qu’il n’y a pas eu d’effusion de sang, sinon celui de son Jésus le jour de la circoncision, Marie peut se rendre sans délai au sanctuaire desservi par les fils de Lévi, non pas pour SA purification, mais pour « LEUR purification », saint Luc tient à le préciser : « Et lorsque furent accomplis les jours pour LEUR purification, selon la loi de Moïse, ils l’emmenèrent à Jérusalem pour le présenter au Seigneur. » (Lc 2, 22)

« Il est écrit dans la Loi du Seigneur : Tout garçon premier né sera consacré au Seigneur ”. » (Lc 2, 23) Et pour le racheter, les parents doivent « offrir en sacrifice, suivant ce qui est dit dans la Loi du Seigneur : un couple de tourterelles ou deux colombelles ” » (Lc 2, 24).

« Ils offrent un sacrifice. La Vierge Marie livre l’Enfant Jésus et quand on le lui a rendu, saint Joseph portait une petite cage à la main contenant soit deux tourterelles, soit deux colombelles.

« Ces petites colombelles sont sœurs, elles se ressemblent beaucoup, elles sont innocentes. Jésus et Marie, à ce moment-là, ce sont deux Cœurs qui se ressemblent, aussi innocents, aussi amoureux de Dieu seul. Une colombelle représente la Vierge Marie, qui s’est offerte pour être la Servante du Seigneur, la Mère du Serviteur souffrant, et l’autre colombelle représente Jésus, le Serviteur souffrant lui-même, dans son oblation à Dieu, pour signifier qu’Il est tout donné à Dieu.

« À ce moment-là, on voit le geste du prêtre ; il a pris les colombes et il les “ balance ”, c’est le mot qui désigne le geste liturgique, il les balance devant Dieu, pour signifier que maintenant, on les donne à Dieu, c’est comme l’offertoire. À peine les a-t-il balancées, il les passe à un lévite qui a un couteau, qui leur tranche la gorge. Imaginez la Vierge Marie qui voit ces deux petits oiseaux innocents, ces deux petites tourterelles. Il leur coupe le cou, le sang gicle, il arrose l’autel, il jette les pauvres petites bêtes égorgées dans un feu où il y en a déjà. Un grésillement, le plumage brûle, avec beaucoup de bruit, la bête disparaît dans le feu.

« Quand on s’offre à Dieu, Dieu prend notre vie. Il fait couler le sang. Tous ces animaux de l’Ancien Testament, qui ont été immolés dans le désert, d’abord, puis dans ce Temple, n’avaient aucune valeur en eux-mêmes, mais dans le Ciel, Dieu pensait à son Fils bien-aimé qui, un jour, serait comme l’Agneau ou comme la colombelle, et Il pensait aussi à la Vierge Marie au pied de la Croix, figurée par l’autre colombelle, le Cœur transpercé. C’est la raison pour laquelle Dieu a voulu que Jésus et Marie miment tous ces rites de 1’Ancien Testament.

« La Sainte Vierge et saint Joseph, en voyant griller dans le feu ces deux bêtes, pensent au genre humain qui ne sera sauvé que par leur holocauste. » (sermon du 2 février 1992).

« Et voici qu’il y avait à Jérusalem un homme du nom de Siméon. Cet homme était juste et pieux ; il attendait la consolation d’Israël et l’Esprit-Saint reposait sur lui. Et il avait été divinement averti par l’Esprit-Saint qu’il ne verrait pas la mort avant d’avoir vu le Christ du Seigneur. Il vint donc au Temple, poussé par l’Esprit, et quand les parents apportèrent le petit enfant Jésus pour accomplir les prescriptions de la Loi à son égard, il le reçut dans ses bras, bénit Dieu et dit :

« Maintenant, Souverain Maître, tu peux, selon ta parole, laisser ton serviteur s’en aller en paix ; car mes yeux ont vu ton salut, que tu as préparé à la face de tous les peuples, lumière pour éclairer les nations et gloire de ton peuple Israël. »

« Son père et sa mère étaient dans l’étonnement de ce qui se disait de lui. Siméon les bénit et dit à Marie, sa mère : Vois ! cet enfant doit amener la chute et le relèvement d’un grand nombre en Israël ; il doit être un signe en butte à la contradiction, et toi-même, une épée te transpercera l’âme ! afin que se révèlent les pensées intimes de bien des cœurs. ” » (Lc 2, 25-35)

Dès ce moment, le vieillard Siméon parle à la Sainte Vierge de la Passion du Christ, de la contradiction qu’Il aura à souffrir de la part des méchants. Et se tournant soudain vers Elle, il lui annonce l’épreuve qu’Elle devra subir, le Sacrifice qu’il lui faudra offrir.

La Vierge Marie l’a su de toute éternité, puis elle l’a appris par les prophéties, en particulier du prophète Isaïe (chapitres 52 et 53), mais elle comprend que l’Heure est venue. Si elle a donné des colombes, des tourterelles en échange de la vie de son Enfant, elle sait très bien que ce sacrifice n’était qu’un offertoire en attente de la consommation du sacrifice de leurs cœurs transpercés par la lance et par le glaive de douleur.

Or, aujourd’hui, deux mille ans après, cette souffrance demeure encore, le Cœur Immaculé de Marie est toujours transpercé, parce que Dieu Notre-­Seigneur est horriblement outragé par les hommes ingrats qui oublient, ou refusent de mettre toute leur espérance en cette Passion, en ces souffrances offertes par Amour pour nous, pour notre salut.

Cependant, en ce jour, Siméon bénit Dieu car le salut d’Israël va venir, et la Lumière va briller pour toutes les nations. C’est la délivrance du monde que cet Enfant et cette Femme apportent au Temple, c’est vrai, mais l’acte même, regardez-le, est un acte véritable de sacrifice, qui ne se fera pas sans une immolation de deux tourterelles, de deux innocents, de deux cœurs, le Cœur de Jésus et le Cœur de Marie.

Frère Bruno de Jésus-Marie