7 AVRIL 2023 - VENDREDI SAINT

La Vierge Marie nous entraîne à partager
le mystère de sa compassion rédemptrice

POUR entrer pleinement dans cette admirable liturgie du Vendredi-saint, méditons sur Notre Dame des sept-douleurs, entourée des saintes femmes et de l’apôtre saint Jean au pied de la croix.

Ces femmes souffrent d’une immense compassion, comme des cœurs de femmes très pures, très saintes, très attachées à Jésus peuvent souffrir. C’est une souffrance d’une extrême pureté, d’une extrême délicatesse, d’une extrême noblesse. Jésus, dans sa prescience divine, a voulu pour sa Mère cet entourage de femmes, parce que la femme est faite pour la compassion. Les apôtres avaient fui...

À partir de là, on peut entrer dans la méditation de la Crucifixion, de cette longue souffrance, qui va mener Jésus au paroxysme de l’amour rédempteur. Cette vision nous donne un accès au Cœur de Jésus par le Cœur de Marie, et au Cœur de Marie par celui des saintes femmes. Nous aurions désiré être avec elles. Nous comprenons que ce fut un instant de suprême délicatesse, de suprême beauté, je n’ose pas dire de suprême joie mais de suprême consommation de l’amour où chacune de ces saintes femmes se trouvait heureuse de se trouver là avec la Vierge Marie. Chacune était heureuse de souffrir là, de ne pas perdre la moindre goutte d’amertume pour aider la Sainte Vierge, l’accompagner dans sa douleur, et pour consoler Notre-Seigneur de son abandon apparent par son Père céleste.

Il traversait la grande épreuve suprême de la déréliction qui n’était pas due à ses péchés. Elle continuait l’épreuve de l’agonie dans cette heure suprême, qu’il avait tant attendue avec crainte et tremblement comme homme, avec désir comme Dieu. Cette heure où il serait identifié non pas au péché des hommes, mais aux pécheurs pour les sauver tous. Entrons en contemplation de ce mystère qui va nous retenir tout au long de ce Vendredi-saint.

Tant de femmes souffrent en ce moment du jour et de la nuit pour des raisons épouvantablement basses. La Vierge elle, c’est pour aider Jésus, coopérer avec Lui au salut du monde, c’est admirable ! Quelle différence avec des femmes qui sont là avec un mari qui fait de la déprime, parce qu’il n’a pas de travail, des enfants qui cassent tout, qui sont déboussolés par tout ce qu’ils entendent en classe... Je pourrais énumérer des listes interminables de cas douloureux, non seulement tristes, mais désolants, abêtissants. Ils sont comme des êtres humains qui souffrent les uns par les autres sans aucun débouché surnaturel. Quel contraste entre le Calvaire et ces photos que nous montrent les journaux de tous ces gens misérables à tout point de vue, même moral.

Troisième tableau de la Sainte Vierge qui, d’un geste large, ouvre ses bras à toutes ces femmes malheureuses. Jésus tend les bras à tous ces hommes malheureux. Ils disent : « Venez souffrir toutes vos souffrances avec nous. »

C’est là ce qui nous meut dans notre Contre-Réforme, dans notre bataille pour le salut de notre sainte religion. Il leur faut la religion pour faire ce lien.

Si personne ne leur parle de la Croix, de la Vierge Marie, ou de la Miséricorde divine de notre Père céleste, ils sont livrés comme cela à tous les démons, à tous les désespoirs, à toutes les peines qui les frappent sans qu’ils en tirent aucun mérite, plongés dans un noir désespoir.

Nous devons faire cette comparaison et nous sentir nous-mêmes prédestinés à nous tenir au pied de la Croix. Nous avons la chance d’être avec la Vierge Marie, Saint Jean et les Saintes Femmes. Non seulement nous y tenir pour nous, mais pour l’immense population humaine qui ne sait pas et qui est loin de cette lumière de l’Évangile. Compatissant aux souffrances du Christ, intercédant pour le salut du genre humain et des plus pauvres âmes, nous n’avons pour cela qu’à continuer notre vie ordinaire. Qu’elle soit menée par nous avec les souffrances d’hier, les souffrances de demain. Toutes ces souffrances sont pour Jésus-Christ et nous tiennent tout près du Cœur très unique et douloureux du Cœur de Jésus et Marie. Cela opère par notre vie quotidienne le salut d’un grand nombre d’âmes.

Voilà de quoi vivre dans la paix et dans la joie, sans craindre toutes les croix que nous aurons à porter dans ces temps mauvais, en union très étroite avec Jésus et la Sainte Vierge. Puissions-nous être assimilés, soit aux saintes Femmes si nous avons le privilège d’être femmes, soit à Saint Jean si nous avons celui d’être hommes consacrés au Christ. Et si nous sommes un enfant perdu, nous pouvons être l’enfant prodigue qui se jette dans les bras de son Père céleste.

Abbé Georges de Nantes
Extrait du sermon du 21 mars 1997