La Vierge Marie dans l’Écriture

NOUS connaissons les événements de la vie de Marie d’abord par la grande Révélation divine ; la Tradition qui corrobore l’Écriture sainte, et qui y ajoute quelques petites choses.

LA VIERGE MARIE DANS L’ANCIEN TESTAMENT

« Malgré leur fidélité à la conception traditionnelle d’un Dieu unique et leur horreur pour une divinité parèdre, les Sages de l’Ancien Testament nous révèlent la présence d’une Sagesse personnifiée auprès de Dieu. On trouve cela dans le livre des Proverbes (ch. 8 et 9) et les passages parallèles assez nombreux (...). Il ne s’agit pas de mettre une femme en Dieu, mais c’est d’autant plus surprenant de voir avec quelle insistance les Sapientiaux ont mis auprès de Dieu une puissance quelque peu féminine, si l’on peut dire, comme pour modérer ce que la signification masculine du Nom de Dieu aurait eu d’abrupt et de terrible.

« Mystérieux dans l’Ancien Testament, ces textes vont devenir d’une importance considérable dans le Nouveau Testament. Sous l’influence du Saint-Esprit, il est indéniable qu’un courant s’est créé dans l’Église, qui a attribué ces textes à la Vierge Marie, la mettant ainsi comme en Dieu, déjà dans le sein de Dieu, avant même qu’elle ait fait sa radieuse apparition dans le Nouveau Testament. Cette Sagesse divine qui est proposée aux hommes a tous les caractères de la femme parfaite : douceur, tendresse, sagesse, vertu, que l’homme doit suivre. » (S 120 : Circumincessante Charité)

“ La Femme ” du protévangile (Gn 3, 15) comme “ l’Épouse ” du Cantique des cantiques, a été aussi très vite identifiée par l’Église, qui a choisi ces textes bibliques pour la liturgie des fêtes de la Bienheureuse Vierge Marie, en raison de leur parfaite évocation du mystère de sa riche personnalité : Immaculée Conception ; Mère de Dieu ; corédemptrice et médiatrice de toutes grâces...

LA VIERGE MARIE DANS LE NOUVEAU TESTAMENT

Quand on écoute les savants libéraux, protestants ou modernistes, on a l’impression que la Vierge Marie n’existe pour ainsi dire pas dans l’Évangile.

SAINT MARC, SAINT PAUL ET LA POLÉMIQUE PROTESTANTE

Saint Marc, qui a écrit le premier, nous transmet ce qu’on a appelé “ la catéchèse de Pierre ”. Or la Vierge Marie n’est pas une seule fois nommée explicitement (...). Pourquoi ? Pour une raison très précise : au moment où saint Marc a écrit son Évangile, la Vierge Marie vivait au milieu de l’Église de Jérusalem. Je n’y vois pas du tout une absence d’influence ou de gloire, bien au contraire. Par respect pour elle, les apôtres et évangélistes ont évité de la mettre en lumière dans des récits qui auraient pour ainsi dire jeté en pâture sa vie privée.

Cependant, dans l’Évangile de saint Marc, il y a deux allusions à la Vierge Marie. Un jour, elle et sa parenté viennent à Capharnaüm pour arrêter Jésus, l’empêcher de se faire remarquer et le ramener de force à Nazareth (cf. Mc 3, 31-35, et le passage équivalent Lc 8, 19). Les protestants en concluent que la Mère de Jésus n’avait pas confiance en lui, et que le Christ a fait connaitre le peu d’influence qu’elle avait sur lui en répondant par un reniement de sa famille : « Quiconque fait la volonté de Dieu, celui-là est mon frère et ma sœur et ma mère. » ou « Ma mère et mes frères, ce sont ceux qui écoutent la Parole de Dieu et la mettent en pratique. »

Au contraire, la Tradition catholique a toujours compris ces passages, comme étant un éloge déguisé et délicat que Jésus adressait à la Vierge Marie, sa Mère. Car s’il en est une qui a fait la volonté de Dieu, qui a écouté la Parole et qui l’a mise en pratique, c’est bien Elle... Dieu veut aussi nous enseigner que la chair, la parenté charnelle ne sert de rien ; c’est l’union de l’esprit et de la volonté, la foi, qui compte à ses yeux.

Mc 6, 1-6 (...) : l’incrédulité des gens de Nazareth nous montre le peu de cas que l’on semblait faire de la Vierge Marie au moment de la prédication de Jésus (...). Ces premiers textes, qui paraissent si contraires à notre thèse, ont tout de même un avantage incroyable : ils nous mettent en présence d’une absence de mystification, et imposent le caractère très concret, très historique de cette relation de Jésus avec une certaine femme qui s’appelait Marie et dont on savait parfaitement qu’elle habitait Nazareth.

En l’an 48 ou 49 à peu près, saint Paul dans l’Épître aux Galates (4, 4-5), parlera de Jésus, “ né d’une femme, né sujet de la Loi ”. C’est la seule allusion à la Vierge Marie que l’on trouve chez saint Paul (...). Il est extrêmement précieux de savoir, par ces petits éléments de la première évangélisation, qu’il était dit que Jésus était fils d’une femme, comme n’importe quel autre homme. Ce sera important contre le docétisme, une hérésie selon laquelle Jésus n’était qu’une espèce d’apparition fantomatique permanente. Non. Il a été engendré par une femme qui s’appelait Marie, de la lignée de David. C’est sa fiche anthropométrique. Quant à cette femme, nous savons qu’elle existait bien réellement et qu’elle a été séparée de lui après la vie cachée, qu’elle était là et que, dans certaines circonstances, Jésus a bien montré qu’Il n’était pas attaché à sa Mère d’un lien charnel, pas plus qu’à sa tribu, à son clan qui ne croyait pas en lui.

SAINT MATTHIEU : MARIE SELON LA PROPHÉTIE (Is 7, 14) : VIERGE ET MÈRE DE DIEU

Saint Matthieu écrit un peu après saint Marc et il parle discrètement des événements qui ont préparé, accompagné la naissance du Christ (...). Mt 1, 21, nous apprend que Jésus est né en accomplissement de la prophétie du prophète Isaïe (7, 14) (...). La version grecque des Septante se traduit par : « Une vierge concevra et elle enfantera un fils et elle lui donnera le nom d’Emmanuel. Nom qui se traduit : Dieu avec nous... » (...). Saint Matthieu reprend cette prophétie d’Isaïe dans un contexte visant à établir d’une manière très claire trois vérités : La Vierge Marie était fiancée à un homme de la maison de David, nommé Joseph, mais ce n’était pas lui le père : C’est comme vierge qu’elle a enfanté Jésus ; Elle est la mère du Messie promis par Isaïe ; ce Messie est « Dieu avec nous », “ Fils de Dieu ”, dira-t-on plus tard. Voilà trois choses absolument étonnantes : Marie est Vierge, Mère, Mère de Dieu.

SAINT LUC, L’ÉVANGÉLISTE DE LA VIERGE

Les années ont passé, la Vierge Marie a pris une espèce de hauteur, de dignité dans l’Église et, maintenant, on peut révéler les choses qu’elle-même a communiquées à saint Jean et peut-être à saint Luc directement, ou à saint Luc par l’intermédiaire de saint Jean (...). Saint Luc se rendait très bien compte qu’il allait révéler au monde des mystères absolument insondables. Il disait : pourvu que je l’écrive, il faudra du temps aux générations pour en comprendre toute l’immensité (...). Que nous apprend-il à petites touches, mais très précises :

1) Que la Vierge Marie, non seulement était une jeune fille qui n’était pas encore mariée, fiancée à Joseph, mais qu’elle avait fait vœu de virginité (...).

2) Cette virginité va être consacrée par Dieu qui, cependant, va lui donner cet admirable complément qu’aucune créature n’a jamais connu en dehors d’elle : Vierge, Dieu lui donnera la maternité en sus de la virginité (...). La Vierge admirable dans sa foi ! ne refuse pas de croire (...) car : « Rien n’est impossible à Dieu. » (...). Vierge avant, pendant et après l’enfantement, elle a mis au monde son fils premier-né sans douleur (...).

3) La Vierge Marie se considère comme servante de Dieu ; elle fait partie comme tous les saints personnages dont elle est vraiment le centre mystérieux des “ pauvres ” d’Israël, des “ humbles ”, de ceux que l’on appelait les “ anâwîm ”, méprisés par les pharisiens, les sadducéens, les scribes, les prêtres, etc (...).

4) Ce qui l’honore plus que tout, et saint Joseph avec elle, c’est la foi. Elle a cru comme autrefois Abraham qui est le père de la foi. Zacharie et Élisabeth, eux, ont hésité à croire à un miracle pourtant bien moins grand.

5) Maintenant, que pouvons-nous dire de cet Enfant ? Saint Luc est absolument d’accord avec saint Matthieu, il accomplit les prophéties de l’Ancien Testament, par exemple, celle de Sophonie 3, 14-17. Chez saint Luc, cela prend une vigueur biblique et scientifique extraordinaire. Dieu, Fils de Dieu, le Roi d’Israël annonçait sa venue dans le sein de son peuple, et le voici qui arrive dans le sein de la Vierge.

6) Et comment cela se fera-t-il ? « L’ombre de Yahweh viendra sur toi, la puissance de Dieu te couvrira. » Cela veut dire que Dieu prendra la place de l’homme, de l’époux, et que c’est par la puissance de Dieu que le sein de Marie sera fécondé. (...). Elle est aussi l’arche d’Alliance comme l’épisode de la visitation le révèle. Élisabeth connaît que son fils est sanctifié par la présence de Marie, puis : « kraugè mégalè », c’est du grec qui se traduit : elle poussa un grand cri. C’est exactement le même mot, le même cri “ liturgique ” qui était poussé par les juifs en présence de l’arche d’Alliance (cf. II S 6), lieu où résidait la présence de Dieu. Saint Luc choisit ce mot bizarre pour nous indiquer qu’il fallait faire une relation : la Vierge Marie est l’arche d’Alliance du Nouveau Testament. Saint Luc nous montre par le fait même, que lorsque la Vierge était grosse de l’Enfant Jésus, elle portait en son sein Dieu lui-même. C’est l’Écriture qui l’affirme.

7) Au jour de la Présentation de l’Enfant Jésus au Temple, le vieillard Siméon prédit à la Vierge que son Enfant doit amener la chute et le relèvement d’un grand nombre en Israël. Il doit être un signe en butte à la contradiction et « toi-même, un glaive te transpercera le Cœur afin que se révèlent les pensées intimes d’un grand nombre. » Dès le départ la Vierge Marie a su que la mission de son Fils, Dieu fait homme, le Messie, va consister à être au centre d’une terrible contradiction. Elle assistera à tout ce drame. Il souffrira atrocement dans sa chair et elle, souffrira épouvantablement dans son cœur (...).

SAINT JEAN ET LA DIVINE MARIE CORÉDEMPTRICE ET MÉDIATRICE DE TOUTES GRÂCES

Il faut lire le Prologue dans le grec plutôt qu’en latin, pour davantage apprécier le mystère (...). À tous ceux qui l’ont reçu, Il a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, à ceux qui croient en son Nom. Qu’est-ce que croire au Nom de Jésus, car c’est de lui qu’il s’agit ? C’est de croire que lui, « Il n’est né – non pas eux (traduction latine) sont nés, mais luini du sang, ni du vouloir de la chair, ni d’un vouloir d’homme, mais Dieu lui-même l’a engendré. Et le Verbe s’est fait chair. » Dans ce petit verset, nous aurions l’équivalent de tout l’Évangile de saint Luc (chapitres 1 et 2). Le Nom de Jésus, ce qui est pour saint Jean le mystère le plus profond de sa personne, c’est ceci : contrairement à tous les autres hommes, Il n’est pas né simplement du sang c’est-à-dire d’une naissance purement biologique, ni d’un vouloir de chair c’est-à-dire d’un instinct sexuel, ni d’un vouloir d’homme c’est-à-dire par une action, par une initiative d’un homme, d’un mâle, mais de Dieu ! Dieu L’a engendré (...).

La foi selon le prologue de saint Jean, c’est de croire en Jésus, non pas simplement comme le Messie des juifs, non pas simplement comme un Sauveur des hommes, mais de croire en Jésus comme Dieu qui s’est fait homme, né de la Vierge Marie (...).

Puis l’Évangile de saint Jean nous parle de la Vierge Marie deux fois seulement pour des événements que l’on ne trouve pas dans les autres Évangiles : à Cana et au pied de la Croix. Jésus l’appelle à chaque fois : « Femme ». Les protestants disent : « Cette manière de parler à sa mère, c’est une manière de la “ rembarrer ” ! » Les exégètes sérieux, Laurentin aussi, disent : « Par ce mot Femme, Jésus veut évoquer « LA Femme » (...) du protévangile Gn 3, 15, et celle du chapitre 12 du livre de l’Apocalypse. Non vraiment, la Vierge Marie n’est pas une petite personne humaine ordinaire (...).

Jésus en Croix ne commence pas par dire à saint Jean : « Voici ta Mère », ce qui voudrait dire d’une manière très pratique : « Maintenant que je ne suis plus là pour m’en occuper, tu la prendras chez toi. » Et, d’autre part, Messieurs les protestants, si Jésus avait eu des frères et sœurs et non pas des cousins (cf. Mc 6, 1-6), Jésus n’aurait pas eu à s’en occuper, la Vierge Marie aurait été reprise en charge par ses fils, les fameux « frères » (qui sont les cousins de Jésus). C’est pourquoi aussi, il ne dit pas à la Sainte Vierge : « Femme, voici pour toi un autre enfant, je te confie celui-là en plus des autres ». Non, Jésus est le Fils unique de la Vierge, c’est très simple.

Jésus commence par nous confier à la Vierge Marie. Il commence par donner l’humanité à cette Femme unique, comme était unique Ève, et c’est nous qui sommes toute la descendance de cette Femme, la nouvelle Ève (...). Sur le mont-Calvaire aux pieds de Jésus sur la Croix, la Vierge Marie a participé aux douleurs de l’enfantement de l’Église, aux douleurs de l’enfantement de toute l’humanité. Ces souffrances et cette gloire la Vierge Marie les éprouve dans la gloire du Ciel comme l’attestent la vision et le témoignage de saint Jean (cf. Ap 12). Ainsi nous avons là comme une sorte de preuve redondante de la Maternité universelle et de la Corédemption de la Vierge Marie. Elle est « la Femme » du Nouveau Testament, l’arche de la nouvelle Alliance, la Mère de tous les hommes, de tous les sauvés (...).

On voit donc déjà poindre dans le dernier livre des Saintes Écritures, une volonté de Bon Plaisir de Dieu qui ne cessera de s’affirmer : la glorifier, Elle, en lui donnant la victoire sur l’adversaire de Dieu et de son église. Le livre des Actes des Apôtres nous en fournit le figuratif. En effet, n’oublions pas que c’est sous l’égide de « Marie la mère de Jésus », dans sa maison du Cénacle, sous son autorité morale, que le collège apostolique s’est reconstitué après le reniement de Pierre et le lâche abandon des autres apôtres, excepté saint Jean. Dans les derniers temps, le livre de l’Apocalypse nous assure d’une victoire semblable après bien des épreuves, semblables elles aussi...

Extrait de Théologie Mariale, première conférence (S 44)