La Vierge Marie dans la Tradition

N’OUBLIONS jamais – nous ne sommes pas protestants – que l’Écriture sainte qui parle si peu, mais si bien de la Vierge Marie, est comme enveloppée d’une aura, d’une atmosphère qu’on nomme la tradition orale (...). Cette tradition vivante, apostolique, a donc enveloppé et porté la tradition écrite que l’Église ensuite a longuement méditée pour en tirer toutes les richesses (...).

1. L’ÉGLISE PRIMITIVE ET PATRISTIQUE

Ce qui est curieux, c’est que, après la mort du dernier Apôtre, saint Jean, pendant environ un siècle, l’Église n’a pour ainsi dire fait que répéter ce qui était dans les Écritures saintes. L’Église avait d’énormes problèmes : elle passait des juifs aux païens et elle avait à centrer son attention sur la prédication des mystères du Christ ; on ne peut pas tout faire à la fois (...). Dès la première génération chrétienne, le peuple a voulu se représenter les événements de la vie de la Vierge Marie. On a fait des récits qui prétendaient être des souvenirs des apôtres, mais qui étaient en fait légendaires ; les auteurs de ces récits qu’on appelle évangiles apocryphes ont inventé des histoires avec beaucoup de piété, mais souvent complètement rocambolesques. Cependant, au milieu de ces Évangiles apocryphes qui sont très nombreux, se glissent des choses qui sont vraisemblables et, en particulier, des vérités que la Tradition a retenues.

Par exemple le Protévangile de Jacques (...) raconte des choses qui sont entrées dans la tradition, des choses que vous croyez vous-mêmes probablement (...). Par exemple, le récit de la révélation de Dieu à Joachim et à Anne qu’ils allaient avoir un enfant qui serait la Vierge Marie ; on voit très bien le décalque : ce qui était arrivé à Zacharie et Élisabeth a dû arriver certainement aux parents de la Vierge Marie ! (...). Ce même Évangile nous raconte la Présentation de la Sainte Vierge toute jeune, offerte à Dieu au Temple par ses chers parents (...). Le récit de la naissance de Jésus, assez disgracieux (...), nous montre à quel point les fidèles croyaient en la parfaite virginité de Marie. Il y avait toujours des “ bonimenteurs ” pour répondre à leur curiosité pour ce qui est du détail des événements. Mais enfin, c’est touchant, et surtout cela témoigne de la vérité du dogme de la foi (...). La Vierge était donc crue et honorée dans l’Église, plus peut-être par la piété des fidèles que par le raisonnement de théologiens (...).

Cependant, dès la fin du deuxième siècle, saint Justin et saint Irénée, comprennent l’importance considérable à la Vierge Marie. Ils l’expliquent en disant que la Vierge Marie est la nouvelle Ève, mère de tous les chrétiens, conçue sans péché (...).

Du IIIe au Ve siècle, c’est le temps des grandes controverses avec les hérétiques. Depuis cette époque on dit que la Vierge Marie est puissante comme une armée rangée en bataille contre toutes les hérésies, en ce sens qu’il n’est pas possible qu’un homme ait une fausse idée de la foi catholique sans que, aussitôt, cela se répercute dans une erreur sur la Vierge Marie (...). Les Pères de l’Église ont eu de violentes contestations avec les hérétiques et, peu à peu, la vérité sur la Vierge Marie a été, à travers toutes ces disputes, établie plus solidement (...).

Au troisième siècle, les manichéens défendaient la virginité de Marie, parce qu’ils condamnaient le mariage. Ils disaient : « La Vierge Marie est restée vierge, parce que les choses du mariage sont obscènes. » En réaction contre cette hérésie, des Pères de l’Église ont été jusqu’à dire que la Vierge Marie était une femme comme les autres et qu’elle ne méprisait pas le mariage, qu’elle était mariée à saint Joseph et que, après avoir eu l’Enfant Jésus, elle a eu d’autres fils et filles, que c’est marqué dans l’Évangile (...). Heureusement, on a mis le holà très vite et on a pu distinguer l’hérésie de la vérité et dire : les manichéens ont tort de condamner le mariage, le mariage n’est pas une chose infâme ; cependant, la Vierge Marie a eu une vocation plus parfaite, celle de la virginité, même dans sa maternité ; quant aux frères de Jésus, il s’agit tout simplement de ses cousins. Jésus-Christ fils unique de Dieu est aussi LE fils unique de Marie (...).

Encore une chose extraordinairement intéressante : quand l’Enfant Jésus est né, la Vierge a accouché par les voies naturelles, bien évidemment. Des théologiens disaient : l’Enfant Jésus est passé à travers sa chair, à travers son hymen sans rien briser. On disait à ces théologiens : « Comment cela peut se faire ? – Jésus était un pur esprit. » Ah ! là ! là ! Qu’est-ce que vous racontez là ? C’étaient les hérétiques qu’on appelle les docètes qui disaient : Jésus n’a eu qu’une apparence d’humanité, ce n’était pas un vrai homme comme nous, il n’avait pas de chair semblable à nous, c’était une chair spirituelle. Pour des gens qui disent que Jésus est une chair spirituelle, que Jésus passe à travers la chair de la Vierge sans la blesser, c’est facile !

Des Pères de l’Église, réagissant contre ça, disaient : « Non, Jésus est un homme comme nous, Il avait une chair comme la nôtre, et Il est né comme nous, et donc Il a déchiré la membrane de la Vierge Marie ! » On tombait d’un excès dans l’autre ! En discutant, peu à peu, avec le contrôle du Saint-Esprit, l’Église catholique en est arrivée à dire que Jésus avait une chair aussi réelle que notre chair à nous et cependant, par un miracle de Dieu, sa virginité a été sauvegardée même dans l’enfantement.

L’Immaculée Conception va obséder l’Église pendant mille six cents ans. Assez vite, les théologiens ont dit que la Vierge Marie était très Sainte, pleine de grâce, toute Sainte (...). Contre l’hérétique Pélage (360-420) qui estimait que cette sainteté était donc à la portée de tous (...), saint Augustin (354-430) objectait : « Tout homme pèche et d’ailleurs tout homme a été racheté par le Sang du Christ, donc tout homme a été dans le péché. » Pélage répondait : « Alors Marie aussi ? – Ah ! Marie, c’est un cas spécial. » Comment faire ? (...).

Certains théologiens disaient : la Vierge n’a pas participé au péché originel, elle n’a pas eu besoin de la Rédemption de son Fils ; erreur mêlée à la vérité. Les autres, même les plus grands saints, même saint Augustin, même saint Bernard (1090-1153), même saint Thomas d’Aquin (1225-1274), le plus grand théologien de tous les temps, ont dit : la Vierge Marie a quand même été frappée par le péché originel. Si elle était absolument sans péché, Immaculée Conception, alors elle n’aurait plus besoin de la Croix du Christ. Or le Christ a donné sa vie pour tous, y compris pour elle. Comment dénoueriez-vous ce nœud gordien, vous ? Bah ! Si l’Église ne l’avait pas dénoué pour nous, je ne sais pas comment nous le dénouerions ! (...).

L’acmé de “ l’âge d’or de la patristique ”, c’est au concile d’Éphèse (431) saint Cyrille d’Alexandrie (378-444) qui fait proclamer Marie, [Theotokos], c’est-à-dire Mère de Dieu, et qui condamne et excommunie du même coup Nestorius qui niait ce privilège (...). Le saint en fit le récit suivant :

Le Concile d’Éphèse en 431.

« Après un jour entier, nous finîmes par condamner le blasphémateur Nestorius sans qu’il ait osé paraître au saint Concile, et nous prononçâmes contre lui la sentence d’excommunication et de déposition. Nous étions réunis environ deux cents évêques. Toute la population de la ville demeura, depuis les premières heures du jour jusqu’au soir, attendant la décision du saint Concile. Quand elle apprit la déposition du misérable, tous, d’une seule voix, se mirent à acclamer le saint Concile et à glorifier Dieu d’avoir abattu l’ennemi de la foi. Puis, à notre sortie de l’église, ils nous reconduisirent jusqu’à l’hôtellerie, portant des torches. Car c’était le soir. Et il y eut de grandes réjouissances et des illuminations par toute la ville ; des femmes allèrent jusqu’à nous précéder avec des encensoirs. C’est ainsi que le Sauveur manifesta sa toute-puissance à ceux qui voulaient diffamer sa gloire. Nous donc, une fois achevé le rapport concernant la déposition, nous nous hâterons de vous rejoindre. »

On sent toute l’allégresse de ce Père après l’un des plus beaux conciles de l’histoire : en une journée – ils n’ont pas attendu des années ! –, ils ont mis le blasphémateur dehors. Nestorius affirmant que Marie n’était la Mère que de l’homme Jésus, c’était blasphémer le Christ qui est Fils de Dieu dans l’unité de sa personne et c’était aussi déconsidérer la Vierge qui devenait une femme ordinaire, mère d’un homme ordinaire. C’était fini de l’Incarnation.

2. L’ÉGLISE EN ORIENT

Saint Basile le Grand

Les moines d’Orient ont toujours eu une extraordinaire admiration pour la Vierge, la “ Panagia ”, comme il l’appelle, la “ Toute Sainte ”. J’ai sous les yeux un hymne de la liturgie de saint Basile le Grand (329-379) ; on appelle ces hymnes “ acathistes ”, tout simplement parce qu’on les chantait debout (...) :

Tu es un sujet de joie pour toute créature, chœur des anges et du genre humain, O comblée de joie ! Temple Saint ! Paradis spirituel ! Louange virginale ! Car c’est de toi que Dieu a pris chair et qu’est devenu petit enfant Celui qui, dès avant les siècles, est Notre Dieu. Ainsi de tes entrailles Il a fait un trône, et Il a rendu ton sein plus vaste que les cieux.

Saint Éphrem le Syrien

On dit que saint Éphrem (306-373) a fait un million de vers en l’honneur de la Vierge Marie ! Il nous en reste de lui des milliers ! (...). Romanos le Mélode (490-555) a chanté, lui aussi, dans des vers infinis la Vierge Marie, mais en racontant sa vie d’une manière très, très dévote. Saint Germain de Constantinople, en 733, a un admirable hymne sur l’Assomption de la Vierge ; l’Assomption sera proclamée dogme de notre foi en 1950 par le pape Pie XII, mais il était déjà cru par l’Orient depuis toujours pour ainsi dire.

Saint Jean Damascène, le dernier des grands docteurs de l’Église d’Orient, qui vivait à Damas et à Jérusalem, au monastère Saint-Sabbas, qui a été un des grands théologiens de la Vierge Marie (...) croyait à la dormition de la Vierge Marie. La mort étant le châtiment du péché et la Vierge ayant selon lui subi une mort pour ainsi dire spirituelle au pied de la Croix du Christ, elle s’est donc simplement endormie, puis son âme et son corps ont été élevés dans le ciel par la force de Dieu. Voilà une tradition qui n’est (pas encore) un dogme de notre foi, mais il se pourrait très bien que, un jour, l’Église réfléchissant davantage, le Pape, les évêques définissent que la Vierge a connu simplement un sommeil mystique avant d’être emportée dans le ciel ; cela ne m’étonnerait pas (...).

3. LE MOYEN-ÂGE

Notre-Dame du Puy

Pendant les huit premiers siècles de l’histoire de l’Église, notre Occident est envahi par les barbares, connaît des difficultés énormes et, ce que nous avons gardé des textes de cette époque-là sur la Vierge Marie est très, très pauvre. C’est quand même le moment où l’on a une grande dévotion pour la Vierge à l’Enfant, et on en fait des statues de la Mère de Dieu qui sont en elles-mêmes extrêmement impressionnantes (...), comme la Vierge de Saint-Nectaire ou la Vierge noire du Puy (...).

L’Occident, à la suite de saint Augustin, a été opposé à l’Immaculée Conception. Car pour lui, puisque le péché originel était une espèce de tare qui passait avec le sang, avec la semence d’un homme à un autre, c’était physique. La Vierge Marie avait été marquée par le péché originel, mais aussitôt après purifiée. À quoi Pélage, qui était contre saint Augustin, disait : « Alors la Mère de Dieu aura été sous la puissance du démon, ne serait-ce qu’un instant ? » En 1060, une fête liturgique que l’on appelle la “ Conception de la Vierge ”, semble déjà annoncer que l’on croit que la Vierge a été très pure, très sainte dans sa conception même. Le peuple va plus loin que les théologiens ! Cette fête, qui est le 8 décembre, ne cessera plus jusqu’à ce qu’en 1854, le pape Pie IXproclame l’Immaculée Conception.

Parmi les hérauts de la Vierge Marie, évoquons saint Anselme qui croyait en l’Immaculée Conception et avait une dévotion, un lyrisme très populaire, très simple pour évoquer les douceurs, les beautés, les gloires de la Vierge Marie. (...) Saint Bernard, lui, hésitait à y croire et même il était contre l’Immaculée Conception (...). Mais ce qui est admirable chez lui c’est son culte pour la Vierge Marie Médiatrice de toutes grâces. Il a des paroles, des sermons admirables de tendresse, de poésie sur la Vierge Marie, sur la confiance absolue que l’on doit avoir en son secours, son intercession ; Notre-Dame est la Mère de miséricorde (...).

À la suite de saint Bernard, d’autres comme les Pères de Saint-Victor, Hugues de Saint-Victor, Richard de Saint-Victor, et une foule de religieux chanteront les louanges de la Vierge. Par rapport à ce douzième siècle très exubérant, très simple qui est comme une première renaissance, le treizième siècle de saint Albert le Grand et de saint Thomas nous paraît un petit peu trop sobre. Saint Thomas d’Aquin, le grand théologien n’est pas tellement à l’honneur sur ce point-là et nous, nous lui en voulons un petit peu de ne pas d’avoir été rebelle à cette idée de l’Immaculée Conception.

Saint Bonaventure

Au même moment vivait saint Bonaventure, fils de saint François d’Assise. Les franciscains vont donner dans la dévotion à la Vierge Marie, avec tout leur cœur et avec tout leur sens de la dévotion populaire. Saint Bonaventure a des quantités de sermons sur la vie de la Vierge Marie où, pour ainsi dire, il la devine, il assiste à la vie de la Vierge Marie (...). C’est le bienheureux Duns Scot, un disciple de saint Bonaventure, qui va résoudre l’objection qui empêchait même des saints de croire en l’Immaculée Conception. C’est la dévotion franciscaine qui remplit les quatorzièmes, quinzièmes siècles.

Durant cette période la dévotio moderna venue des Pays-Bas se développe ; le culte de la Vierge devient un peu plus romantique, trop humain (...). Au lieu d’avoir ces superbes Sainte Vierge sur les portails de nos cathédrales, de toute pureté, sobriété, sainteté, on va avoir de plus en plus des visages gracieux, des formes féminines ; finalement, les peintres de la Renaissance feront des portraits de la Vierge Marie, hélas ! comme ils font des portraits de telle ou telle femme. Rembrandt a toujours peint la Vierge Marie sous les traits de sa femme. C’est une dégradation, c’est un humanisme, une humanisation de la piété qui est toujours à craindre. Finalement, on fait de la Vierge une femme charmante, mais tout humaine et toute féminine, ce qui ne convient absolument pas.

Les franciscains, Jacopone de Todi notamment, vont nous préserver de cet humanisme par leur attrait pour le dolorisme (...). Ils ont été les premiers à considérer surtout la Vierge au pied de la Croix et à comprendre que Marie ne pouvait être plus grande que dans le tragique du Calvaire (...). Elle est restée debout au pied de la Croix, c’est-à-dire pleine de courage, de dignité, de majesté, mais dans les douleurs d’un nouvel enfantement, celui des hommes pécheurs à la grâce. Voilà l’admirable développement de la piété des franciscains qui aboutira à notre Souvenez-vous, qui est du quinzième siècle (...).

François Villon sera condamné à être pendu en 1463, finalement il ne le sera pas, mais, dans l’entre-deux, il aura composé cet admirable poème à la Vierge que l’on apprenait autrefois par cœur dans les écoles (...). C’est un malandrin, un voyou du Moyen-Âge qui va être pendu et qui fait appel à la Vierge Marie, sur le conseil de sa mère, pour être pardonné. Cela montre à quel point notre Moyen Âge qui construisit toutes ses basiliques et grandes cathédrales en l’honneur de Notre-Dame avait la foi en la Vierge Marie, une foi très juste, très orthodoxe en même temps que très délicate et très filiale. Que c’est beau, ce peuple tout entier, cette Chrétienté tout entière qui se considérait comme fille de la Vierge Marie !

4. LA CONTRE-RÉFORME CATHOLIQUE (XVIe-XVIIe siècle)

Tout cela s’est brisé au seizième siècle et le protestantisme est arrivé là-dessus, trouvant que toute cette dévotion était de l’idolâtrie, il a brisé les têtes des statues, détruit les images et prostitué les religieux et les religieuses en les faisant sortir de leur monastère. Là où il n’y a plus de pureté, il n’y a plus de dévotion à Marie. Durant le seizième siècle, il n’y a plus de dévotion à la Vierge Marie, ni de grands auteurs ou poètes qui livrent des pièces remarquables, c’est une époque d’occultation, c’est la première, après celle des temps barbares, ce ne sera pas la dernière (...). Il faudra le concile de Trente, le retour de l’Église à l’ordre, la fondation de nouvelles congrégations, la réforme du Carmel, la fondation de l’ordre des Jésuites, etc., toute cette admirable renaissance de l’Église qui a suivi le concile de Trente pour donner ce qu’on a appelé la “ Contre-Réforme catholique ” (...).

Le début du dix-septième siècle a vu une prodigieuse efflorescence de vie mystique. La Vierge Marie occupe une place tout à fait centrale. Là je ne peux vous citer autre chose que des noms, ce sont des noms de gens qui nous sont très connus :

Saint Pierre Canisius, Saint François de Sales, le plus grand des saints du dix-septième siècle à mon avis, le plus admirable docteur de l’Église (...). « Bérulle et Olier seront les initiateurs d’un mouvement qui va ramener la Sainte Vierge au cœur de la théologie trinitaire et de la mystique chrétienne. Avec eux et surtout les disciples du meilleur de leur esprit, saint Jean-Eudes et saint Louis-Marie Grignion de Montfort, c’est la parfaite sainteté de la Vierge qui est mise en lumière. La Vierge Marie n’est plus seulement exempte du péché originel, formulation privative, négative, mais sa parfaite sainteté et les privilèges qui en découlent résident dans l’inhabitation de la Sainte Trinité en elle, c’est-à-dire dans ses rapports intimes, sa relation particulière avec le Père, avec le Fils et le Saint-Esprit. Il en résulte que la Vierge Marie est plus divine qu’humaine, expression pieuse et première formulation du dogme de la foi qui sera promulgué en 1854 : L’Immaculée Conception. (cf. S 117, L’Immaculée Médiatrice)

Parmi les chantres de la Vierge Marie au XVIIe siècle, il faut mentionner Corneille qui chanta l’Immaculée Conception en d’admirables poèmes (cf. Les plus beaux textes sur la Vierge Marie ; Père Pie Régamey, p. 22-224). Bossuet pour finir, qui chantera dans sa langue admirable, les louanges de la Vierge avec une théologie très sûre (...). Ce retour à la dévotion à la Vierge Marie, nous en avons une preuve, nous Français, dans la consécration de la France à Marie par Louis XIII, en 1638. Cette consécration fait pour toujours de la France un pays, un royaume consacré à Marie (...).

Au moment du jansénisme, saint Grignion de Montfort a été un des rares, avec bientôt saint Alphonse de Liguori, à résister contre ce dessèchement de la piété qui a été l’un des plus grands malheurs de la France du dix-septième siècle. Pourquoi ce jansénisme est-il survenu après cette magnifique exubérance mystique de l’École française de spiritualité du début du dix-septième siècle ? C’est un malheur. Les calvinistes n’avaient pas pris en France, parce que c’était une religion trop renfrognée, pessimiste, obscure, calamiteuse. Le jansénisme a été une reprise du calvinisme en France qui a mordu et qui nous a tenus, on peut dire jusqu’à environ 1830-1850 (...).

Nous arrivons au dix-huitième siècle. De 1750 à 1830, les œuvres en faveur de la dévotion à Marie seront extrêmement rares et nous connaîtrons les affres de la franc-maçonnerie, de la Révolution, les guerres de l’Empire. La Restauration, certes légitime, a malheureusement accepté un compromis avec la Révolution et les idées de Satan. On l’a payé cher. Chaque fois, qu’il y a des périodes creuses dans l’histoire de la spiritualité mariale, chaque fois, on peut dire que c’est une période creuse pour la religion tout court et aussi et même pour le monde (...).

5. L’ÉPOQUE CONTEMPORAINE

Apparition de la Vierge Marie à sainte Catherine Laboué.

En 1830, la Révolution triomphe en France et dans le monde entier. Mais voici que la Vierge Marie va intervenir, en plein centre de Paris, et faire de la politique, contrerévolutionnaire, royaliste. Elle prévient à l’avance sainte Catherine Labouré de la chute du roi Charles X et des grands malheurs qui vont affliger la France et le monde entier (...). La Rue du bac, ce sont les miracles de l’effigie de la Médaille miraculeuse, c’est-à-dire ceux, mais c’est tout un, de Marie-Médiatrice et de l’Immaculée Conception. Ces deux grands dogmes modernes sont là dès 1830, au point de départ d’une extraordinaire succession d’apparitions de la Sainte Vierge reconnues par l’Église, et confortées par l’autorité du Magistère puisqu’en 1854, Pie IX proclame l’Immaculée Conception : [La Salette (1846) ; Lourdes (1858) ; Pontmain (1871) ; Pellevoisin (1876)]. Cette suite impressionnante d’apparitions se termine en apothéose par celles de Fatima en 1917 (...). Le salut du monde et de l’Église, tout dépend désormais de l’obéissance du « Saint-Père » aux demandes de la Vierge Marie. Il y viendra, la Sainte Vierge nous en assure d’une manière inconditionnelle : « A la fin, mon Cœur Immaculé triomphera... »

En 1950, lorsque le pape Pie XII définit le dogme de l’Assomption de la Très Sainte Vierge, l’Église est à la veille de connaître des triomphes absolument inouïs dans le monde entier. (...). À peine douze ans plus tard, le plus grand concile de tous les temps, Vatican II, aurait dû glorifier la Sainte Vierge Marie, en établissant qu’elle était vraiment corédemptrice et médiatrice de toutes grâces... Ce fut au contraire, d’ordre du pape Paul VI, et sous prétexte d’œcuménisme avec les protestants, un dépouillement des plus divins privilèges de la Vierge Marie (...). Nous assistons à une occultation délibérée du culte envers la Vierge Marie. Par le fait même, l’Église perd ses âmes consacrées, les prêtres défroquent, les religieuses partent, il n’y a plus de vocations, le peuple chrétien se vautre dans la corruption. Cela va ensemble et annonce de grands châtiments.

Extrait de Théologie Mariale, deuxième conférence (S 44)